Eh oui, c’est le dernier Nothomb, le 20ème roman qu’elle… publie. Cette griffonneuse compulsive rédige trois à quatre histoires par an et Claire Delannoy, la directrice littéraire, n’a plus qu’à piocher dans le panier (à terme, ça promet une kyrielle de romans “inédits”…). Or, si vous avez lu ces dernières productions, vous avez peut-être été déçus, un peu frustrés de ne pas retrouver le souffle de certains romans… Alors, quid du dernier ?
Un bon cru
Si la jeune femme aux chapeaux nous propose un revival de Barbe Bleue, comme le titre pouvait le laisser entendre, ce cadre n’est qu’un prétexte utilisé par l’auteure pour poser plein de questions intéressantes.
Comme dans la majorité des œuvres de l’écrivain belge, ce roman est, avant tout, un dialogue, un échange – enlevé et empreint de mystère – entre une jeune femme, Saturnine, et un barbon espagnol, Elmirio Nibal y Milcar. On ne peut pas s’empêcher de faire le parallèle avec Nina et Pretextat Sach, les personnages découverts dans “Hygiène de l’Assassin”… On retrouve, en effet, la joute verbale et la concision du phrasé, les aphorismes et les propos qui fusent ; assénés plus qu’échangés.
Toujours le même personnage ?
Dans la plupart de ses romans, Amélie donne le sentiment qu’elle cherche à aller au bout d’une logique et mieux comprendre un sujet ; par exemple, avec – le très bon – “Attentat”, c’était la notion de beauté.
Ici, dans les échanges des deux personnages, elle évoque l’art, la foi, la subtilité des relations homme/femme (parfois…). Comme d’habitude, son personnage féminin ne s’embarrasse pas de… cosmétique ennemie (sic), de phrasés patauds ou de lieux communs. Les répliques fusent, ciselées, évidentes. L’héroïne ne donne pas de réponse mais pose les questions qui dérangent, celles qui incitent à chercher, au fond de soi, une réponse, vraie et sincère.
On peut admettre que, de Nina à Saturnine, en passant par Pannonique (“Acide Sulfurique”) et Françoise (“Mercure”), c’est toujours le même personnage qui revient dans les romans d’Amélie : une femme singulière et intègre qui ne s’accommode pas des discours creux et de la facilité des idées communément admises. C’est ce qui est somme toute plaisant avec cet auteur : le fait qu’elle nous invite/incite, l’espace d’un roman, à ne plus regarder le monde avec nos regards étriqués.
De fait, on peut au moins reconnaitre ce mérite là à “Barbe bleue”, ce d’autant plus qu’on a plaisir à lire ce roman, quand bien même la fin est un peu cavalière…