Aux origines des trucages : Segundo de Chomon à la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé

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Aux origines des trucages : Segundo de Chomon

Fondation Jérôme Seydoux-Pathé du 29 novembre au 19 décembre

Moins connu que Feuillade dont le mythe est lié aux films à épisodes ou Méliès « l’enchanteur », le nom de Segundo de Chomon est pourtant associé à une œuvre collective importante : pas moins de 500 films pour ce pionnier du cinéma relativement méconnu dont l’histoire serpente entre la France, l’Espagne et l’Italie.

Descendant d’un chevalier français du nom de Chaumont, il arrive à Paris à la fin du XIXe siècle et y épouse une artiste lyrique qui travaille pour Méliès. Parti faire la guerre à Cuba, il revient à Paris et entre chez Charles Pathé lequel, comme Méliès, alimente en courtes bandes les baraques foraines mais compose des programmes variés au lieu de vendre à l’unité. Commence alors sa période française où il s’intéresse tout à la fois aux trucages, à la couleur, à l’animation et aux différents genres mis en scène.

Il serait ainsi l’inventeur du travelling. Jusqu’à lui, la caméra pouvait se déplacer mais son support mobile n’était pas conçu pour le cinématographe ; c’était un bateau ou un train. Chomon imagine l’usage d’un chariot spécifique permettant des déplacement latéraux mais aussi de donner du relief aux décors en creusant l’image. Il travaille aussi le mouvement inversé, les fondus enchaînés, les effets d’échelle, les surimpressions et dédoublements, les substitutions de personnages par arrêt de caméra et même ce qu’on appellera plus tard le split-screen. Dans Voyage sur Jupiter (1909), les murs de la chambre du roi se transforment en ciel étoilé mais le lit du roi ne bouge pas, seul le fond change. Un buste de femme s’anime dans Métempsychose (1907). Les femmes deviennent fleurs, papillons ou oiseaux. Il devient possible de voir le diable dans de nombreuses fantasmagories où l’enfer apparaît surtout comme décoratif, amusant et libertin.

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Chomon, qui débuta comme coloriste, fût l’inventeur d’un procédé de colorisation, le cinémacoloris mais qui fut rapidement supplanté par d’autres procédés concurrents. Par ailleurs, s’il ne fut pas l’inventeur du dessin animé, il serait le premier à avoir utilisé non pas des marionnettes actionnées par des fils mais des pantins articulés dans un procédé d’animation image par image. Avant lui, on trouve bien des poupées qui se déplacent mais elles ne sont pas en mouvement ; les jambes par exemple ne bougeaient pas.

Les collaborations de Chomon sont diverses. En France, en autres avec Gaston Velle, en Italie avec Giovanni Pastrone qui fait appel à lui en tant qu’opérateur spécialisé ou technicien truquiste. De 1912 à 1919, il travaille pour Itala Film à Turin, se retrouve responsable des maquettes et effets spéciaux de Cabiria (1914). C’est pendant sa période italienne et la Grande Guerre, qu’il réalise son film le plus célèbre : La Guerra e il sogno di Momi (1916). Le père parti au front, envoie une lettre lu par le grand-père et l’enfant assoupi imagine en rêve une guerre menée par des jouets. Personnages réels et animations se mêlent à l’image.

La période espagnole (1910-1912) de Chomon avec les productions Chomon-Fuster puis Iberico reste la plus méconnue. Les années 20 sont marquées par un retrait progressif de l’artiste, comme si la pleine maîtrise du cinéma muet ne pouvait s’accommoder d’un certain esprit expérimental lié aux commencements. Les mondes imaginaires et les sortilèges de Segundo de Chomon seront déclinés en une dizaine de programmes à la fondation Jérôme Seydoux-Pathé du 29 novembre au 19 décembre. Un rendez-vous à ne pas manquer.

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