Jason Reitman, c’est le fils d’Ivan (SOS Fantômes…). C’est aussi le réalisateur de quelques très bons films comme In The Air, Thank You for Smocking ou Juno, mais aussi de films plus plats comme Last Days of Summer ou Young Adult. Son nouveau film, Men, Women & Children veut traiter de l’adolescence à l’ère de l’hyperconnexion. Alors, dans quelle catégorie atterrira-t’il ?
Synopsis
Men, Women & Children brosse le portrait de lycéens leurs rapports, leurs modes de communication, l’image qu’ils ont d’eux-mêmes et leur vie amoureuse. Le film aborde ainsi plusieurs enjeux sociétaux, comme la culture des jeux vidéo, l’anorexie, l’infidélité, la course à la célébrité et la prolifération de contenus illicites sur Internet. Tandis que les personnages s’engagent dans des trajectoires, dont l’issue est parfois heureuse et parfois tragique, il est désormais évident que personne ne peut rester insensible à ce bouleversement culturel qui déferle sur nos téléphones, nos tablettes et nos ordinateurs.
Critique
Réaliser un film sur l’adolescence est toujours compliqué. Si certains en ont fait leur spécialité (Gregg Araki ou Larry Clark par exemple), d’autres ont réalisés des chef d’œuvres générationnels (Virgin Suicide de Sofia Coppola, ou plus anciennement le Lauréat de Mike Nichols). Avec Juno qui était réussi, on pouvait s’attendre à une réussite pour Jason Reitman sur Men, Women and Children.
Sauf que le risque avec un film sur l’adolescence, c’est aussi d’entrer de plein pied dans les stéréotypes, et de se planter lamentablement. Et c’est malheureusement ce qui est arrivé avec ce film.
On y retrouve évidemment les classiques du film sur l’adolescence : la relation à l’autre, aux autres, au sexe, le conflit parental etc… Mais l’axe qu’a choisi de prendre Reitman sur ce film (celui de l’hyperconnexion sociale avec les nouveaux moyens de communication) rend tout cela malheureusement lourd et indigeste.
Lourd, car on a la sensation que le film a été réalisé par Familles de France. Tous les maux (ou presque, nous y reviendrons) sont dûs au méchant INTERNET. Chaque personnage du film (à deux exceptions près, sur 14, ça fait maigre) abuse d’un pan d’Internet, ce qui viendra inéluctablement à ruiner sa vie. Que ce soit la consommation de porno, l’hyperprotection d’une mère, l’utilisation des sites de rencontre extraconjugaux ou la création de site de “modeling” à chaque fois on tombe dans un stéréotype digne de la pire discussion de comptoir. Les personnages (à part nos deux exceptions) ne font preuve d’aucune finesse, d’aucun discernement quant à son utilisation d’Internet (excusez-moi, du MÉCHANT INTERNET), ce qui les rend donc complètement stéréotypés, à tel point qu’un Thor semble être un modèle de complexité dans Avengers.
Dommage donc, car jusqu’à la dernière minute, on voit des portes de sorties “intelligentes” qui se présentent au réalisateur pour ne pas complètement exploser son scénario. Sauf qu’à chaque fois, il semble l’ignorer et préférer sombrer dans une situation dramatique au possible rendant le film tarte à la crème.
Certains critiqueront que le film ne tourne quasiment qu’autour du sexe, mais après tout, n’est-ce-pas le sujet principal de tout film sur l’adolescence ? C’est le cas de la quasi intégralité des films d’Araki ou de Clark, et pourtant on ne les blâme pas pour cela. Et ce notamment car cet axe semble assumé. Ici, on ne sait pas trop où on va, et on a la sensation que Jason Reitman veut aborder le sujet du sexe sans trop savoir ce qu’il veut en faire, rendant alors ce thème fouillis, brouillon, et semblant ne pas alors avoir sa place dans le film.
Cerise sur le gâteau, certains arcs narratifs n’apportent rien à l’histoire. Les personnages évoluent dans leur monde, n’interagissent pas ou peu avec les autres, et même l’hyperconnexion n’est pas au cœur de leur histoire. Vous l’aurez compris, cet arc aurait pu être totalement ignorée, le film serait resté le même…
Tout n’est cependant pas à jeter. Formellement, Jason Reitman maîtrise le film et la réalisation est propre. Le casting est excellent, avec mention spéciale pour Jennifer Garner en mère paranoïaque, Adam Sandler en père de famille frustré et Ansel Elgort (Nos étoiles contraires) pour son rôle en retenue. On retrouve aussi avec plaisir Judy Greer (Le Village, La Planète des Singes…), Dean Norris (Hank Schrader dans Breaking Bad), Dennis Haysbert (le président de 24) et J.K Simmons (Whiplash, Spider-Man, Young Adult…).
En conclusion, un film qui passe à côté de son sujet, sombrant dans des stéréotypes navrants, malgré un excellent casting. Dommage donc, n’est pas réalisateur de films sur l’adolescence qui veut !