Continuant son bonhomme de chemin sans tambours ni trompettes, le spin-off du grandiose Breaking Bad s’offre une seconde saison d’une sacré trempe. N’ayant finalement pas grand chose à envier à son ancêtre, l’origin story de l’avocat véreux Saul Goodman est certainement une des meilleures séries du moment. Critique d’une saison 2 d’une série aussi discrète que brillante.
Synopsis
Dans sa vie après Walter White, Jimmy travaille dans une cafétéria et se retrouve coincé pendant quelques heures dans le local poubelle du centre commercial. En attendant d’être libéré, il grave un message dans le mur : « SG was here. » En 2002, encore troublé par son expérience avec les mafieux, Jimmy décide de refuser l’offre du cabinet Davis & Main et ferme son cabinet. Kim essaie de comprendre et pour cela, Jimmy l’enrôle dans une de ses arnaques…
Critique
Remettons déjà dans son contexte, Better Call Saul est donc un spin-off de Breaking Bad, la série consacrée de Vince Gilligan. Centrée autour du personnage de Saul Goodman / Jimmy McGill, la série nous présente donc l’ascension du personnage, Breaking Bad ayant mis en scène sa chute. Mêmes lieux, (presque) mêmes personnages, on s’attend tout au long de Better Call Saul de voir quelle(s) surprise(s) nous réserve(nt) les auteurs. Et là où Gilligan et Peter Gould (le créateur de Saul Goodman) excellent, c’est finalement à nous faire oublier les aventures de Walter White afin de mieux nous concentrer sur celles de Jimmy McGill.
Chose étonnante avec Better Call Saul, c’est que la série semble savoir exactement où elle va, dans la certitude qu’elle sera prolongée (et c’est tout le mal que l’on lui souhaite). Chose d’autant plus étonnante que sa prolongation est finalement décidée chaque année, ni Netflix ni AMC n’ayant signé de contrat à long terme avec les auteurs. Et pourtant, Gilligan et Gould prennent leur temps, à poser les personnages et les relations dans la saison 1, l’intrigue dans la saison 2. Force est donc de constater à l’issu de cette saison 2 que l’on est finalement impatient de voir l’évolution de Kim, Chuck, Howard au moins autant que Nacho, Mike ou évidemment Jimmy que nous connaissons déjà.
Better Call Saul, c’est aussi le retour dans le désert du Nouveau-Mexique et dans cette ville d’Albuquerque. L’utilisation du même univers que Breaking Bad permet d’insister encore plus sur la comparaison entre les deux séries. Et rien n’est à prouver sur la capacité des showrunner à évoluer dans cet univers : qui critiquera l’univers de BB ? D’une adaptation rapide du spectateur, ce dernier s’attache désormais à de nouveaux lieux, agrandissant ainsi sa carte mentale de la ville, se demandant si finalement les White ne vivent pas dans tel ou tel quartier, ou en reconnaissant une maison de temps en temps.
L’univers et les personnages étant posés lors de Breaking Bad et de la saison 1, la saison 2 de Better Call Saul peut donc se recentrer sur son histoire, ou plutôt ses histoires qui nous conduirons irrémédiablement vers les évènements de Breaking Bad. L’écriture envolée est toujours là (si ce n’est même supérieure à Breaking Bad sur de nombreux points), la réalisation frôlant la perfection nous démontrant que les showrunner non seulement connaissent parfaitement leur univers et leurs spectateurs, mais aussi qu’ils s’amusent ouvertement à nous raconter l’histoire de ce pauvre Jimmy McGill.
Revenant sur la réalisation, les amateurs de la grande beauté des plans et cadres de Breaking Bad sauront se délecter des chefs d’oeuvres produits dans Better Call Saul, le plan séquence de la traversée de la frontière mexicaine de l’épisode 8 restera pour cela dans les annales.
Parlons maintenant de ce que Better Call Saul a en plus de Breaking Bad : la profondeur des relations entre personnages. Là où Breaking Bad était finalement assez limité (en dehors de la relation Walter/Jesse, Walter/Skyler et Walter/Gus à une période), Better Call Saul creuse des relations pointues entre tous les personnages, et Jimmy McGill n’est finalement même pas au coeur de toutes. Si il est évident que l’amour qu’il porte pour Chuck et Kim le poussera à devenir Saul Goodman, les relations entre Mike et Nacho, Nacho et la famille Salamanca, Kim et Howard sont tout autant importantes, fines et suffisamment bien écrites pour être prenantes, se suffisant parfois à elles mêmes, sans besoin de la touche de Jimmy. Inutile de dire que tout ce groupe d’acteurs incarnent parfaitement leurs personnages, même si sur ce point, Bob Odenkirk et Jonathan Banks tiennent la dragée haute (en même temps, ils connaissent déjà leurs personnages). A côté, Michael McKean incarnant Chuck est tout aussi brillant que Rhea Seehorn en Kim.
En conclusion, cette saison 2 de Better Call Saul confirme le ressenti de la saison 1, elle incarne une vraie force tranquille. Pas de volonté de se mettre en avant, de faire le show ou d’en faire toujours plus. Elle sait garder le ton juste pour non seulement s’accorder avec la mythologie de Breaking Bad tout en imposant la sienne par dessus. A tel point qu’on commence à s’étonner désormais de ne pas avoir vu les personnages de Better Call Saul dans Breaking Bad plutôt que le contraire ! Bref, cette série est un vrai succès et mérite d’être considérée comme telle, certainement l’une des plus qualitative de l’offre actuelle. On lui souhaite ainsi de tracer sa route jusqu’à son apogée et l’arrivée de Saul Goodman !