Le documentaire « Europe she loves » de l’Helvète Jan Gassmann, présenté cette année au Festival de Berlin en ouverture de la section « Panorama », prend le parti de nous présenter quatre couples de jeunes gens âgés de vingt à environ trente ans évoluant dans quatre villes européennes en crise, à savoir Tallinn en Estonie, Séville en Espagne, Dublin en Irlande, Thessalonique en Grèce. Des radios, des postes de télévision évoquent Poutine ou la dette de l’Espagne, et la musique composée par le pianiste suédois David Wenngren ajoute bien au film une certaine dose de gravité supplémentaire, mais cette jeune génération a déjà assez à faire, essayant tant que faire se peut de bien s’aimer dans tous les sens.
Jan Gassmann se révèle un excellent cinéaste, filmant très joliment avec sa caméra Alexa, et sachant brillamment capter de petits gestes de sensualité furtifs comme une soufflette sur un balcon, un sexe encore en érection dont l’extrémité est dissimulée et calée contre le corps de l’autre après un ébat musclé. Il explore l’amour dans la chaleur torride de l’été ibérique, l’amour sous cocaïne dans un Dublin maussade, l’amour dans une douche estonienne, ou bien encore l’amour sur un lit grec. Le film peut paraître trop ambitieux dans sa volonté, exhibée par le titre, de brosser un tableau exhaustif du couple européen, mais, en choisissant quatre villes européennes extrêmement différentes, il parvient d’avoir un petit aperçu de ce que ça peut vouloir dire, « s’aimer dans la vieille Europe ».
En effet, la force du film naît du contraste entre un continent malade, criblé de dettes, où l’on ne trouve pas d’emploi même le plus modeste, et la vitalité toujours inaltérée des corps et la volonté, toujours et encore réaffirmée, de s’aimer envers et contre tout, ou alors de faire l’amour encore une ultime fois, car ces couples sont en partie menacés : Penny du couple grec va partir pour un séjour en Italie à Gênes, Karo du couple espagnol exprime le désir de quitter Séville après ne pas avoir été reçue au Master qu’elle voulait.
On peut regretter quelques longueurs, mais « Europe she loves » s’avère être dans l’ensemble une passionnante étude sociologique sur l’amour en Europe, bellement filmée en outre. Il faut enfin saluer l’excellent travail d’un montage effectué à huit mains – celles de Max Fey, Jacques L’Amour, Miriam Mark et Roland von Tessin -, qui arrive subtilement à lier les quatre histoirespar de beaux effets de transition et de brouillage – faisant en sorte qu’à un moment on croit voir le couple grec faire l’amour alors qu’il s’agit en réalité du couple irlandais -, à les entrelacer d’images de paysages, d’autoroutes nocturnes et d’immeubles désaffectées, et à créer, comme écrirait Suzanne Liandrat-Guigues, des « liaisons secrètes » et des « accords vagabonds ».
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