Après “La fille du 14 juillet” en 2013, Antonin Peretjako, diplômé de l’École Louis Lumière, récidive et creuse son sillon avec “La Loi de la Jungle”.
Pour notre plus grand plaisir.
Synopsis
Marc Châtaigne, stagiaire au Ministère de la Norme, est envoyé en Guyane pour la mise aux normes européennes du chantier GUYANEIGE : première piste de ski indoor d’Amazonie destinée à relancer le tourisme en Guyane. De mésaventure en mésaventure, on lui affuble un coéquipier. Pas de chance c’est une pin-up. Pire : elle a du caractère.
Critique
On ne saurait souligner assez combien l’arrivée d’un trublion tel qu’Antonin Peretjako fait du bien au cinéma français, combien son burlesque féroce, tout autant politique que poétique et constamment inventif peut servir d’antidote efficace à toutes les comédies ronflantes et peu drôles qui polluent le paysage, celles d’un Eric Lavaine (qui à part Incognito et Bienvenue à bord n’a réalisé que des bouses), ou d’un Fabien Onteniente (dont les nanars, certes parfois attachants en raison notamment de la présence d’un fantastique Franck Dubosc, restent d’authentiques nanars).
Peretjako signe un cinéma burlesque où les gags ont une autre finalité qu’eux-mêmes et charrient une part de critique sociale, politique à l’égard, par exemple, des relents de néo-colonialisme de la politique française, ou de dysfonctionnements criants – comme ce stagiaire de 37 ans qui au fond n’est qu’à peine une caricature, ou alors une part de poésie. Tout n’est certes pas parfait dans La Loi de la Jungle, certains gags s’avèrent plus réussis ou plus drôles que d’autres, mais le tout dégage un tel vent de fraîcheur que l’on peut qu’être conquis.
Le réalisateur arrive à créer son propre territoire, à recycler des références évidentes – des Monty Python à De Broca en passant par Rappeneau, Godard et les Marx Brothers – pour, à l’arrivée, aboutir à un résultat extrêmement singulier et original. Autre point positif : il a nettement progressé, car si La fille du 14 juillet pouvait s’apparenter encore à une suite de gags, le scénario de La Loi de la Jungle s’avère beaucoup plus riche, dense et touffu – à l’image, d’ailleurs, d’une jungle. Le projet ubuesque de construction de piste de ski en Guyane se mêle admirablement à l’histoire du stage de Marc Châtaigne et de sa romance avec l’incomparable Tarzan.
S’il évolue dans un registre dans lequel on l’a déjà vu, Vincent Macaigne s’avère cependant une fois de plus succulent, reconduisant des éléments certes déjà familiers, mais avec une aisance incontestable : élocution hésitante, démarche maladroite, air complètement déboussolé. Quant à Vimala Pons, elle fait une fois de plus des étincelles dans le personnage de Tarzan qui tient de la bande-dessinée. Elle compose une figure romanesque et pleine de charme, à la fois drôle, volcanique et intrépide mais aussi vulnérable par intermittences. Le casting est enfin complété par des figures familières de différents types de comédies françaises – de Mathieu Amalric de la comédie “d’auteur” au Suisse Jean-Luc Bideau en passant par l’Inconnu Pascal Légitimus -, mais aussi des comédiens moins connus mais tout aussi irrésistibles, tels que Fred Tousch en huissier inénarrable et Rodolphe Pauly en ingénieur aussi arrogant que stupide.
Pour résumer, La Loi de la Jungle est un film très généreux qui regorge de trouvailles et d’idées, une véritable tornade comique qui emporte tout sur son passage et auquel l’on pardonne aisément quelques maladresses ou baisses de régime ponctuelles.