Critique Le vent se lève, un film d’animation d’Hayao Miyazaki

Le héros du film Le vent se lève

Hayao Miyazaki, après son départ, laissera une trace importante dans l’histoire du cinéma. L’un des meilleurs réalisateurs japonais de tous les temps est aussi l’égal de Disney en terme d’animation. Plusieurs de ces films sont des chefs d’œuvre et ont marqué toute une génération, la mienne. Avec Le vent se lève, Hayao Miyazaki signe son dernier film. Un opus beaucoup plus réaliste et mature mais toujours empreint de la même poésie et de la même tendresse.

Synopsis

Inspiré par le fameux concepteur d’avions Giovanni Caproni, Jiro rêve de voler et de dessiner de magnifiques avions. Mais sa mauvaise vue l’empêche de devenir pilote, et il se fait engager dans le département aéronautique d’une importante entreprise d’ingénierie en 1927. Son génie l’impose rapidement comme l’un des plus grands ingénieurs du monde.

Le Vent se lève raconte une grande partie de sa vie et dépeint les événements historiques clés qui ont profondément influencé le cours de son existence, dont le séisme de Kanto en 1923, la Grande Dépression, l’épidémie de tuberculose et l’entrée en guerre du Japon. Jiro connaîtra l’amour avec Nahoko et l’amitié avec son collègue Honjo. Inventeur extraordinaire, il fera entrer l’aviation dans une ère nouvelle.

Critique du film

Hayao MiyazakiLa genèse de ce film est un peu particulière. Pas sa fabrication, qui s’est faite dans le cadre bien rodé des studios Ghibli, mais plutôt la naissance de cette histoire. Pour l’écrire, Hayao Miyazaki s’est inspiré d’une personnalité réelle, un ingénieur ayant marqué son pays avec la création de l’avion Zéro. Il a emprunté son histoire et y a ajouté des éléments fictifs, également inspirés d’un roman de Tatsuo Hori afin de de communiquer son point de vue sur le monde, la passion et le Japon à cette époque.

L’un des premiers aspects du film qui saute aux yeux, ce sont les nombreux parallèles entre le jeune ingénieur, passionné, rêveur, hyper-travailleur, et Hayao Miyazaki lui-même. Le personnage doit réaliser ses plus grands travaux tant qu’il a du génie créatif, quitte à sacrifier sa vie. On retrouve également, dès le début du film et à plusieurs moments, des moments de rêve. le personnage principal se retrouve dans des situations qui permettent au réalisateur de laisser sa fantaisie prendre le dessus, tout en distillant des éléments importants à la compréhension des thématiques du film. Ainsi, dès l’introduction du film on comprend l’ambition du héros et le fait qu’il risque de se bruler les ailes.

Ces séquences de rêve ainsi que les séquences plus romantiques apportent beaucoup de poésie au film. On retrouve également l’humour habituel du réalisateur à travers quelques situations rocambolesques et surtout des seconds rôles plein de charme. Hayao Miyazaki change peut-être de style, mais il ne perd pas ses (très bonnes) habitudes. Au rayon des nouveautés, c’est l’émotion que dégage le film qui surprend. Si on a déjà pu être ému par les précédentes œuvres du cinéaste, ce n’était pas de cette manière, pas avec cette intensité. Ici, on est face à un mélodrame et quelques évènements sont particulièrement poignants. Qu’il s’agisse de la petite histoire ou de la grande histoire, plusieurs images et situations choquent. On pense un peu au film Le tombeau des Lucioles, qui a fait craquer la majorité d’entre nous je pense. Ici, on craque peut-être moins facilement. Cela ne veut pas dire que le film est moins fort.

En effet, à travers les choix et comportements du personnage principal, Hayao Miyazaki créé beaucoup d’ambiguïté. Mais il ne juge point. il montre les actes d’un personnage, sa passion, ses rêves et les conséquences que cela a sur sa vie et sur le Japon. A moins que ce ne soit la politique du moment du Japon qui est cette influence sur la vie du jeune homme… Hayao Miyazaki montre que rien n’est facile.

Le film est le grand favori pour l’Oscar du meilleur film d’animation de l’année (à très juste titre) mais cela ne l’empêche pas de créer de la polémique. Au Corée du Sud notamment, on reproche au réalisateur de ne pas montrer ce que l’avion créé par l’ingénieur a apporté de monstrueux pendant la guerre. Une polémique stupide à mes yeux. On ressent très bien les horreurs de la guerre dans le film, sans avoir à rentrer dans les « détails » ou plutôt la surenchère. Tout est fait en retenue, à tel point que le discours pacifiste du réalisateur n’est pas visible par tout le monde. Et pourtant, Hayao Miyazaki est un grand pacifiste. Il est actuellement en opposition avec le gouvernement qui souhaite réformer la constitution en renonçant à son article 9 synonyme de « refus de guerre à tout jamais » afin de remilitariser le pays. C’est un autre histoire mais cela permet d’y voir clair dans les intentions du cinéaste. Il est un vrai pacifiste et ne cautionne pas du tout ce qui a été fait avec l’avion construit par son héros. Il veut juste « protéger » ce personnage et sa génération en montrant qu’ils n’avaient pas vraiment le choix et devaient subir ce qui leur était dicté pour accomplir leurs rêves.

A 72 ans, Hayao Miyazaki signe un dernier très grand film, certes différent de ses précédents mais pas moins personnel, bien au contraire. Il vient boucler une carrière extra-ordinaire d’un artiste engagé, c’est certain, mais avant tout bourré de talent.

Bande annonce VF Le vent se lève

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