Watchmen est peut-être film le plus controversé de l’année 2009, même si globalement le film a plu il n’a pas manqué de diviser aussi et les fans du comic book notamment . L’Adaptation cinématographique la plus attendue de l’année pour diverses raisons mais en même temps redoutée pour d’autres notamment le caractère jugé par beaucoup inadaptable du comic book, Watchmen a enfin finit par pointer le bout de son nez après avoir été avorté plusieurs fois , après les menaces de la Fox pour bloquer la sortie du film peu de temps avant sa sortie , bref après avoir été longtemps considéré comme l’Arlesienne, Watchmen le film a pris forme concrètement en 2009 .
Le résultat final semblait difficile à appréhender à la vue des différentes : photos, vidéos, interviews et au vue de la complexité foncièrement atypique du comic book d’Alan Moore et Dave Gibbons. C’est donc très sceptique et en même temps très excité que l’on découvrait Watchmen sceptique d’autant que les adaptations des comics d’Alan Moore au cinéma hormis V Pour Vendetta n’ont pas données grand-chose. Watchmen en comics étant une œuvre si dense, si complexe, si extrême, si particulière et si unique qu’il est difficile d’imaginer une adaptation ciné viable.
D’autant plus que plusieurs grands cinéastes se sont cassés les dents à tenter d’élaborer une adaptation : Terry Gilliam, Darren Aronofsky, Paul Greengrass ce qui contribué à la réputation inadaptable au cinéma de l’œuvre (Terry Gilliam avait dit que le seul moyen d’adapter Watchmen était de le faire sous la forme d’une mini-série d’environ 5 heures), c’est finalement entre les mains heureuses de Zack Snyder que le projet atterrit.
Alors mon topo sur l’ami Snyder : J’ai vu par hasard un après-midi L’armée des Morts que l’on m’avait prêté , je ne savait pas vraiment quoi attendre du film et à l’époque ce genre ne m’attirait pas plus que ça . De plus je ne voyait pas vraiment l’intérêt d’un remake au Zombie de Romero , pourtant assez vite j’ai ravalé ma salive et pris une bonne claque devant ce film , qui fut une excellente surprise , Snyder se réappropriait bien le film de Romero et y apposait une patte qui faisait mouche. En fait si Snyder est aujourd’hui un réalisateur quelque peu controversé cela découle de son film suivant 300 adapté du comics de Frank Miller , 300 a propulsé Snyder sur le devant de la scène médiatique et l’a propulsé d’une certaine manière roi de l’adaptation de comics aux yeux de la Warner , avant tout pour moi et pour beaucoup d’autres 300 c’est une bande-annonce qui défonce tout sur son passage : des punchlines de fous furieux , une esthétique qui claque et l’impression du film ultime dans son genre . Il faut le reconnaitre le film n’était pas à la hauteur de sa mythique bande-annonce , personnellement pour moi 300 est un pur plaisir coupable , violent , idéologiquement douteux , sans grande subtilité mais foncièrement jouissif et divertissant . Alors oui j’ai aimé les 2 premiers films de Snyder , pourtant son adaptation quasi case sur 300 me laissait perplexe pour Watchmen car ce traitement me semblait quelque peu inapproprié . Mais c’était oublier que Snyder est un grand fan des comics et un homme profondément respectueux de l’œuvre originale mais aussi de ses fans. Vous l’aurez surement déjà compris aussi controversée puisse être cette adaptation cinématographique je me range du coté des défenseurs du film de Zack Snyder.
Pour transposer à l’écran ce récit le réalisateur a fait un choix , celui de la grande fidélité au récit original dans son adaptation, ce choix est l’une des premières raisons de la controverse du film, les détracteurs de Snyder et de son film estiment qu’il se contente de reprendre le comic book case par case, d’autres poussent plus loin en dénonçant une sorte de perversité dans ce procédé qui au final trahit l’œuvre originale plus qu’autre chose. C’est surement le reproche le plus souvent effectué à l’encontre de Zack Snyder. Personnellement je ne suis pas fan des adaptations copié/collé aussi bien pour les adaptations de romans (j’ai détesté Da Vinci Code ou récemment je n’ai guère plus apprécié Millenium) que pour les adaptations de Bande-dessinées (même si j’aime le Sin City de Rodriguez et j’ai globalement plutôt apprécié 300 de Snyder), ce type de procédé se veut généralement un moyen s’attirer la sympathie d’une partie des fans.
Le cas Watchmen est plus complexe car pour diverses raisons notamment de longueurs et d’écriture, un seul film ne peut transposer à l’écran tout le comic book sans certaines coupes et donc des choix sont nécessaires de la part des scénaristes et du metteur en scène.
Le scénario du film est on ne peut plus honorable car il parvient condenser la trame principale tout en modifiant quelques détails ( notamment la fin qui malgré tout reste la même dans le fond et qui s’avère un changement pertinent à mon sens) , en supprimer d’autres : les intrigues et personnages secondaires essentiellement et surtout le fameux Tales of The Back Freighter ( néanmoins une version longue et définitive va sort début Novembre 2009 aux Etats-Unis avec l’intégration du kiosque et du comics Tales of The Back Freighter au sein du film , ainsi que quelques autres scènes supplémentaires déjà ajoutées au premier director’s cut ). Le principal dans ce scénario est que l’essentiel est bien retranscrit et fonctionne, même quand plusieurs situations et dialogues sont repris à identiques ou presque, à l’écran cela a une vraie dimension cinématographique et c’est finalement ce que le fan du comic book que je suis espérais : avoir un film et pas un diaporama vulgairement animé. Cette fidélité a d’autres avantages innés : le film n’édulcore pas ainsi le contenu original, et on retrouve une bonne parties des thématiques au cœur des comics, certaines disparaissent car propres au support BD d’autres sont moins misent en avant.
Mais le matériau originel est d’une telle richesse que même si lors de son adaptation le film perd certains éléments il en demeure quand même plus riche en réflexions que la plupart des films qui sortent sur les écrans et que 95% des productions de cette ampleur budgétaire.
L’autre point que je mettrai en avant est que malgré des choix scénaristiques qui collent de très près au comic book, le réalisateur tout en reprenant par moments cases par cases la bande-dessinée parvient en même temps à extraire quelques chose de réellement cinématographique avec son adaptation et à mon sens hisse le film vers autre chose qu’un simple copié-collé mais un vrai grand film. En effet Snyder parvient à afficher une maitrise incroyable qui étonne d’autant plus qu’il n’en est qu’à son troisième long-métrage , il atteint ici une vraie maturité en dosant davantage ses effets de style ( et les utilisant la plupart du temps de manière justifiée et non maniérée) et proposant quasiment le plus souvent une approche intelligente pour ce qu’il met en scène ( la caricature du réalisateur : slow motion + gore excessif et coté poseur dans la réalisation me semble quand me semble quand même franchement excessive à la vue de ce film et surtout davantage un procès d’intention facile ).
Sa réalisation a l’ampleur et la classe nécessaire pour porter le film , avec son lot de clins d’œil, références pour les cinéphiles dans les cadres , d’autres pour les connaisseurs de la BD tout cela glissés le long du film ( la scène d’ouverture est en ce sens un monument condensant références , fidélité et en même temps personnalités du réel dans le style avec une efficacité imparable ). Ou simplement quand il reprend les 7 premières cases de la BD sous la forme d’un long travelling vertical, c’est ce genre de choix de mise en scène qui m’amène à penser que tout en respectant le matériau de base Snyder lui injecte quelque chose qui lui permet un passage au cinéma réussi.
Il parvient aussi à retranscrire les différentes ambiances du comics qui varient selon les personnages même si le bémol vient du traitement d’Adrian Veidt – Ozymandias moins bien traité que les autres c’est dommage. A part ça le réalisateur ne se borne pas aux éventuelles censures et est sans concessions mêmes lors des passages les plus crus des comics que ce soit au niveau de l’image ou des dialogues, certains lui ont reproché de rajouter des effets gores gratuitement au long du film mais au final, ce reproche se limite à 2-3 passages ou cela peut-trouver sa justification à mon sens.
Snyder propose des scènes d’actions furieuses et violentes mais terriblement efficaces, le pré-générique ou la scène en prison en sont à mon sens des très bons exemples, quand au coté poseur de Snyder à mon sens il s’est bien calmé depuis 300, et les donc ces scènes d’actions qui s’avèrent par ailleurs pas si nombreuses que ça dans le film sont de franches réussites même si en somme un élément mineur dans l’ensemble.
Là ou le cinéaste a beaucoup progressé c’est dans son approche des personnages ( c’était là que péchait pas mal 300 ) , en reprenant la structure du comics il reprend aussi la variation des points de vues et parvient à proposer un rendu étoffé sur chacun des protagonistes ( mis à part Ozymandias un peu trop mis à l’écart comme je le disais précédemment ), tout comme il retranscrit brillamment leurs relations et rapports pas toujours clairs.
Le réalisateur réussit à rendre émouvantes certaines scènes majeures (magnifique scène de transformation du Docteur Manhattan, le plus beau passage du film) et propose globalement un traitement intelligent et assez subtil (malgré quelques petits détails et par moments des reprises cases par cas qui se sentent un peu trop).
Esthétiquement on ne peut pas je pense redire grand-chose, épaulé par des effets spéciaux et une technique irréprochable le réalisateur reconstitue avec brio l’univers génial imaginé par Gibbons, et le rendu visuel du film est comme dans 300 à couper le souffle et d’une richesse incroyable, les costumes ont été pour certains retouchés et un peu actualisés tout comme certains décors, on a affaire à du très beau travail. Mais bon ce n’est pas une surprise et c’est le point sur lequel j’avais le moins de craintes avant de voir le film disons le clairement .
Mais le boulot de Snyder ne se résume pas à cela il s’appuie au-delà de la technique, c’est aussi au niveau de ses choix de casting que le réalisateur parvient à surprendre, en piochant des acteurs peu connus le cinéaste a fait un pari et au final, même je vais revenir dessus plus en détails, on note quelques révélations et globalement des acteurs impliqués qui s’imprègnent bien des rôles pas toujours évidents, donc sérieusement pour ma part pari gagné .
Les deux meilleurs du film sont pour Jackie Earle Haley dans le rôle de Rorschach et Jeffrey Dean Morgan parfait dans le rôle du comédien , tout deux sont bluffant et correspondent vraiment à l’image que j’ai pu me faire des personnages en lisant la BD et le plus me semble t’il c’est que au passage sur grand écran ces personnages très « décriés » bénéficient d’un léger rajout d’humanité apporté par les acteurs et peut-être plus encore que dans la BD finissent tout deux par être attachants au-delà de ce qu’ils ont pu faire de plus ou moins horrible.
Le reste du casting est aussi dans l’ensemble même si Matthew Goode en Ozymandias est le seul qui ne me convainc pas totalement, j’ai déjà émit mon bémol sur le traitement du personnage dans le film il en est de même pour la prestation de l’acteur en deçà de ses collègues je trouve. , Malin Akerman est un Spectre Soyeux aussi sexy que dans le comics tout en retranscrivant assez bien la complexité du personnage ( malgré des coupes par rapport au comics ) par rapport à ce que j’ai pu lire je trouve le travail de l’actrice globalement bon voir très bon , Patrick Wilson retrouve la fragilité et en même temps la détermination qui anime son personnage et enfin Billy Crudup dans une performance vocale réussit pourtant à humaniser le Docteur Manhattan et à retranscrire ses émotions et rien que pour cela bravo…
Ensuite passons à un autre point polémique de cette adaptation : la bande-originale divisée en deux albums, d’abord un score de Tyler Bates dans l’ensemble très efficace, ce n’est pas ça en fait le point polémique c’est plutôt le soundtrack composé d’un pot-pourri de morceaux des années 80 choisis par Snyder qui lui a valu à nouveaux des critiques là ou j’y vois de la part du cinéaste une implication supplémentaire et des parti pris de sa part.
Les morceaux choisis cherchent soit à instaurer un décalage soit à être en symbiose avec l’état d’esprit des personnages ce qui fonctionne la plupart du temps , par exemple « I’m Your Boogie Man » en fond lors de la scène ou Le Comédien et Le Hiboux sont face à des émeutiers ou « The Sound of Silence » de Simon & Garkunfel lors de l’enterrement du Comédien. Pour ces deux exemples cités c’est là où ça fonctionne le mieux.
Parfois certains titres font tache néanmoins ( 2 ou 3 ) c’est évident : « Hallelujah » lors de la scène entre Le Hiboux II et Le Spectre Soyeux II dans les vaisseaux c’est effectivement plus limite. Mais d’autres choix aussi sont vraiment parfaits : le morceau de Bob Dylan sur le générique de début évoqué dans les comics qui accompagne le générique d’ouverture, donne lieu à l’un des moments les plus brillants du film aussi l’un des seuls passages Snyder a réinventé ou s’est réapproprié par rapport aux comics et un générique qui est d’or et déjà culte. On note aussi la présence de deux autres titres évoqués dans le comic book « You’re My Thrill » de Billie Holliday et « My Chemical Romance » de Desolation Row
Bref cette fameuse soundtrack malgré effectivement quelques choix relativement douteux, est davantage un plus pour le film et apporte un angle supplémentaire et compense avec les choix de réalisations de Snyder lors de certaines scènes clés ce qui était je pense l’un des buts recherchés par le réalisateur.
En résumé je trouve que cette adaptation a des défauts : notamment des détails qui font taches comme le nez du président Nixon beaucoup trop caricatural , quelques effets de mise en scène de trop ou trop appuyés , 2,3 choix musicaux à cotés de la plaque et certaines scène moins fortes que dans le récit initial ( par des scènes comme celle du meurtre de l’amante Vietnamienne enceinte ont un coté mécanique qui diminue leur impact par rapport à la scène écrite en bande-dessinée ) , le personnage et l’interprétation d’Ozymandias moins bien que le reste…Mais ces défauts restent globalement mineurs surtout en vue de la tache initiale de Snyder , qui est à mon sens incroyablement bien accomplie , les légers défauts sont peu gênants au final .
Car d’un des plus grands comics jamais écrit, Zack Snyder réussit une œuvre magistrale et propose un travail colossal qui force le respect aussi sombre, violent et complexe que son modèle. Le film de Snyder est à mon sens d’une qualité inespérée pour le fan du comic book que je suis qui se prend à nouveau une claque à la vision de ce film.
Snyder s’impose comme un réalisateur brillant formellement, dont les progrès par rapports à ses films précédents sont ici considérables et qui en plus ose beaucoup dans une industrie de plus en plus formatée, ce qui le rend d’autant plus précieux pour la suite.
Watchmen en film est je pense au final une œuvre aussi fascinante que stimulante et rare .
+ Version Ultimate Cut ( 3h35 )
Fan du Comic Book à la base et au final ayant beaucoup apprécié l’adaptation dès son montage Cinéma j’attendais énormément du Ultimate Cut promis par Snyder qui voit s’ajouter au film + de 45 minutes dont l’incrustation au sein du métrage du fameux Tales of The Black Freighter et les passages du kiosque, en plus des quelques scènes et plan rajoutés dans un premier director’s cut sorti au moment de la sortie DVD aux USA .
Alors au final ce Ultimate Cut ne change pas fondamentalement le film de Snyder , mais l’enrichie , le densifie au détour de petits détails qui font leurs apparitions et permettent au film d’approfondir et de donner davantage de sens à certains passages . Les rajouts sont pour la plupart d’intérêt et par instants le temps de quelques séquences peut-être de manière plus franche que dans la version cinéma , on a l’impression de voir l’adaptation ultime de Watchmen , et ça ce n’est pas rien .
Pour ce qui est de Tales of The Black Freighter le rapport au sein du film fonctionne avec les transitions entre le Kiosque et le dessin animé qui suivent le schéma du comic book , et le récit est prenant et viscéral donc c’est en cela bien de l’avoir intégré seulement dans la BD cela a un vrai sens que le film ne peut apporter en l’état , il aurait encore fallut un nouveau montage pour ça ou alors que Snyder tranche clairement ses intentions ce n’est pas le cas .
Ce Ultimate Cut à sa manière propose quelque chose de plus sombre et plus violent encore que sa version cinéma , surtout plus touffu et plus proche du Comic Book , j’ai adoré Watchmen au ciné je l’adore encore plus dans cette version , fait important à souligner la durée encore plus longue n’est pas un handicap .