Southland Tales de Richard Kelly

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Film maudit , d’abord présent à Cannes en 2006 , puis remonté pour sa sortie cinéma 1 an et demi après aux états-Unis ou le film peu aidé par une maigre distribution fit un bide colossal , en France il a fallut attendre2009 pour voir le film arriver , et même pas de sortie en salle , on doit se contenter d’un maigre dvd .

Il est important aussi de situer le parcours de Kelly au moment de la projection à Cannes de “Southland Tales” , propulsé au rang de jeune prodige et d’auteur culte dès son premier film “Donnie Darko” en 2002 (NDLR : explication du film dispo ici) , fans du film et la critique qui l’avait soutenu attendaient ce deuxième opus comme une nouvelle bombe à effet immédiat comme a pu l’être “Donnie Darko” , et c’est un peu l’effet inverse qui s’est produit , bien que le film ai déjà à l’époque trouvé des défenseurs il a déçu et désarçonné une grande partie d’un public qui partait à priori plutôt conquis , depuis “Southland Tales” traine la réputation d’une sorte de fourre-tout prétentieux et incompréhensible…

Voyant le film bien après toutes ces polémiques et après avoir vu les deux autres opus de Kelly ( “Donnie Darko” et “The Box” sorti quelques mois après le dvd de Southland Tales en France , et au cinéma cette fois ) , que j’ai tout deux adoré , je souhaitais depuis un moment tenter l’expérience “Southland Tales” et c’est désormais chose faite…

Globalement j’ai apprécié ce film , même si à la première vision j’aurais quand même une large préférence pour ses deux autres films , il me semble que davantage encore que ses deux autres opus , “Southland Tales” nécessite plusieurs visions pour tenter de décrypter plus en profondeur ses multiples sens et niveaux de lectures.

Richard Kelly a été extrêmement ambitieux avec ce film : il a d’abord sortis 3 chapitres en BD puis le film qui est censé conter les 3 suivants , résumant à la fois les 3 premiers chapitres dans leurs grandes lignes pendant les premières minutes de film puis racontant les 3 autres dans les 2h10 qui suivent , Kelly livre un maximum d’informations que le spectateur a du mal à digérer et assimiler car il en reçoit par flot au fur et à mesure du film ( est ce que le montage Cannois permettait de respirer davantage du fait de sa durée plus longue ? )…Ainsi cette ambition extrême peut être vue comme la limite du film car vu comment Kelly s’y prend on peut se demander si tout ça c’est pas trop ambitieux pour un seul film , qui plus est seulement son deuxième opus…Mais à coté l’univers que met en place Kelly a beau être extrêmement complexe il n’en est pas moins cohérent dans l’ensemble , ensuite à l’heure ou les produits formatés sont de plus en plus courant , je pense aussi qu’il faut encourager des cinéastes comme Kelly qui restent totalement intègre , et en marge du système , et qu’il faut encourager ce type d’ambitions même si ça peut laisser un gout d’inaboutie ( à la première vision du moins ).

Ensuite “Southland Tales” est un film plein de qualités aussi bien au niveau thématiques que de l’imagerie déployée , dans sa caractérisation des personnages on a pu reprocher à Kelly d’utiliser des stéréotypes mais ça trouve son sens d’abord parce que il ne faut pas oublier que le film est la suite d’une BD et veut s’inscrire clairement dans un pan de la culture geek et ce qui la définit , ensuite cette façade stéréotypée cache une approche plus subtile et plus profonde , Kelly se joue de clichés en s’amusant à casser les conventions que pourrait avoir sur le papier tel ou tel personnage , et en lui conférant au fur et à mesure du film une dimension supplémentaire inattendue . C’est ainsi que son casting essentiellement constitué d’acteurs de seconde zone ou has-been surprend agréablement puisque les acteurs sont globalement bons alors que l’on attendait pas forcément des miracles de leur part : Dwayne Johnson ( alias The Rock ) dans le rôle principal surprend parce que bien dirigé l’acteur arrive ici à quelque chose de saisissant dans sa composition à défaut d’être parfait , la meilleure surprise est venue pour moi de Sarah Michelle Gellar qui fait merveille actrice porno , icône médiatique et enfin notre Christophe Lambert national m’a amusé lors de ses rares apparitions .

Ce qui est saisissant dans ce film c’est aussi le traitement assez décomplexé avec lequel Richard Kelly aborde son récit , se jouant régulièrement des conventions le metteur en scène tire son film vers le décalage et l’absurde , ça peut désarçonner mais c’est très efficace et pertinent , quand on voit que le réalisateur tente de parler de toutes les questions qui se posent ou se sont posées dans l’Amérique post-11 Septembre , le voir s’amuser à tourner en dérision la politique Américaine , la parodier dans une œuvre qui semble pourtant si sérieuse , si grave dans sa conception et son propos , c’est une forme de tour de force que d’effleurer divers sujets brulants et savoir poser le recul nécessaire pour les tourner en dérision afin d’appuyer la portée critique de l’œuvre .

Après le film est très référencé , documenté si bien que les multiples symboliques ne sont pas évidentes à saisir mais sont une preuve supplémentaire du degré d’implication du metteur en scène , car au delà de son scénario touffu et de son énorme potentiel thématique , “Southland tales” est aussi le film d’un réalisateur très doué qui livre une esthétique qui emprunte à différents pans de la culture geek ( que certains se plaisent à appeler sous-culture ) , qui mélange les effets narratifs en utilisant divers supports à sa portée ( journal télévisé , web , bd , cartoon , clip… ) , et aussi livre des sacrés séquences qui flirtent avec une forme de lyrisme très belle ( le final assez éblouissant , l’ouverture après le résumé de début de film …)…

Il y aurait encore énormément à dire sur ce film qui s’il n’est pas parfait propose une expérience unique , affirme une foi de plus la personnalité insaisissable de son metteur en scène ,qui parvient à mêler satire de l’Amérique à vision prophétique de l’apocalypse , mêler les thématiques jusqu’à en perdre le spectateur mais bizarrement ne semblant jamais se perdre…“Southland tales” est une œuvre extrême qui pour peu qu’on se laisse prendre au voyage mérite plusieurs visions pour l’apprécier davantage et en découvrir les subtilités et sens plus en profondeur…

Et si Richard Kelly était une des meilleurs choses qui soient arrivées au cinéma Américains dans les années 2000 ? Retrouvez ce film en cliquant ici.

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