C’est un noir, un sudiste, un irlandais, un asiatique, un mexicain, un trappeur et un indien qui entrent dans un village…
Nous vivons dans une ère de remakes, ils fleurissent en grands nombre de nos jours. Mais il ne faut pas se méprendre : de tout temps, l’exercice cinématographique du remake fut d’actualité. Parfois, un réalisateur fabrique une nouvelle version de son propre film, à l’instar de Cecil B. DeMille pour Les Dix Commandements (1923 ; 1956). Certains remakes ont en effet été de très belles réussites, jusqu’à éclipser l’original que beaucoup ont oublié et qui était pourtant loin d’être mauvais ; c’est le cas de Scarface (1932 ; 1983). Mais bien souvent, l’œuvre originale est loin d’être égalée (qui peut prétendre réaliser Psychose mieux qu’Alfred Hitchcock, franchement ?). En effet, il peut sembler absurde de vouloir refaire un film qui était déjà réussi et peut-être aurait-on plutôt intérêt à adapter des films ratés, mais qui avaient un bon potentiel ou une véritable singularité. Ou alors, pardonnez-moi, mais la réadaptation d’un chef-d’œuvre a intérêt à apporter un parti pris original ou une vison nouvelle pour ne pas laisser les connaisseurs en reste.
Mais tout le monde n’est pas puriste comme votre serviteur et la tendance actuelle est plus au remake à but lucratif. Il est vrai que la prise de risque est moindre, car si le matériau de base a déjà plu, il n’y a pas de raison que les gens n’aille pas voir ce nouveau film (et ça marche).
Mais trêve de généralités, Antoine Fuqua peut-il réaliser Les Sept Mercenaires mieux que John Sturges ? N’oublions pas que le film de 1960 est un grand classique, lui même adapté du film d’Akira Kurosawa, Les Sept Samouraïs (1954). Quand de tels réalisateurs ont déjà raconté cette histoire, on peut dire que la barre est haute. Alors, les Sept mercenaires version 3.0, quid ?
Synopsis
Dans l’ouest américain post guerre de Sécession, un village de mineurs est oppressé par Bartholomew Bogue, un riche industriel brutal et sans pitié, qui réprime la moindre once de rébellion par la force. Les habitants exploités engagent un chasseur de prime remarquable (Denzel Washington) pour les libérer du joug de Bogue. À l’annonce du nom du tyran, le roi de la gâchette se fait un devoir de combattre l’énergumène et ses nombreux hommes de main. Pour ce faire, il enrôle 6 compagnons particulièrement doués dans l’art du combat, chacun dans son style personnel (l’irlandais plein d’esprit, le hors-la-loi mexicain, l’as des couteaux asiatique, l’ex-soldat confédéré tireur d’élite, le trappeur à la stature colossale et l’amérindien fier et courageux).
Ensemble et malgré leurs différences ethniques et morales, les sept mercenaires s’unissent pour accompagner les habitants du village dans leur rébellion et combattre à leurs côtés dans une fusillade finale sanglante mais décisive.
Critique du film
Les Sept mercenaires est un film à grand spectacle. Un « blockbuster ». Et en tant que tel, on peut dire qu’il fait bien son travail : le film est divertissant et nous offre de bons moments d’action.
Le ton est principalement léger, notamment dans toute la première partie du film où l’on s’amuse de la découverte des personnages (on retrouve certaines scènes présentes dans les versions antérieures, comme par exemple le duel au couteau qui met en scène le personnage de Billy Rocks). Et puis dans la dernière partie, on rejoint les codes du western classique à la John Wayne, avec un affrontement final aux allures de siège.
À priori, il s’agit donc d’un authentique film de cow-boy, et il s’assume en tant que tel : ça canarde à tout va, surtout dans cette fameuse séquence de fin, qui peut sembler un peu longue si l’on préfère explorer les aspects psychologiques d’une histoire plutôt que d’observer des scènes d’action pure et dure pendant de longues minutes. Mais pas de panique, la mise en scène est efficace et soignée et si vous aimez voir les actions épiques des héros au combat, vous ne vous ennuierez pas. Toutefois, Antoine Fuqua reste un tantinet trop sage et souvent trop proche de ses références en termes de réalisation pour réellement marquer les esprits.
Dans l’optique de divertir les masses, le film prend logiquement le parti de préférer l’action au développement de l’aspect psychologique et du propos, qui pourtant auraient mérité un peu plus d’attention ; plusieurs fois, des pistes sont lancées sans vraiment avoir d’impact émotionnel sur le spectateur (l’histoire de vengeance du personnage de Denzel Washington joue un rôle déclencheur, mais semble superflue car trop en marge de l’histoire principale).
Le point de vue est plutôt manichéen, à tors ou à raison (les précédentes versions l’étaient de fait), mais à notre époque, on aurait certainement pu se permettre de donner plus de relief aux personnages, notamment à l’antagoniste principal. On n’aurait pas non plus détesté voir la troupe de mercenaires se chamailler un peu plus, au vu de leurs origines diverses et leurs mœurs contradictoires.
En somme, le film est assez réussi. Il pêche un peu sur quelques détails mais le matériau de base est respecté. On y a ajouté de l’humour, les épices et la sauce blockbuster des années 2010 et au bout du compte, on prend plaisir à redécouvrir cette histoire. Le film se cantonne à son statut de film à grand spectacle et l’assume très bien, mais il aurait été encore plus intéressant de ménager une place au milieu des fusillades pour exploiter un peu plus la richesse de cette histoire.
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