#Deauville2023 Hommages et premières

The Pod Generation

Synopsis 

Dans un futur proche où l’intelligence artificielle prend le pas sur la nature, Rachel et Alvy, couple new-yorkais, décident d’avoir un enfant. Un géant de la technologie, vantant les mérites d’une maternité plus simple et plus paritaire, propose aux futurs parents de porter l’enfant dans un POD. Alvy a des doutes, mais Rachel, business-woman en pleine ascension, l’incite à accepter cette expérience…

Critique 

Sophie Barthes s’appuie sur un concept fort et prend le genre de l’anticipation à contrepied on livrant une comédie accessible et légère. Le résultat est drôle, sans mettre de côté les nombreux enjeux complexes vers lesquels évolue notre société. The Pod Generation repose sur une proposition intime qui favorise l’empathie pour ce couple victime d’une société aux travers de plus en plus plus nombreux au fur et à mesure que l’intrigue avance.

Après une première partie très plaisante, il est dommage de voir le film conclure de manière précipitée. Le manque de caractérisation des personnages est aussi un peu frustrant, mais on sort de la séance très heureux. Niveau interprétation, c’est variable, alors que ce qui est demandé est plutôt simple. Si Chiwetel Ejiofor s’en sort très bien, Emilia Clarke surjoue beaucoup, manque de nuance et semble parfois perdue.

Au final, il s’agit d’une comédie intelligente, bien qu’assez artificielle sur les bizarreries des nouvelles technologies déjà à l’oeuvre dans notre société et celles qui pourraient bien arriver. On est pas devant Idiocraty, mais on voit quand même l’évolution possible d’un humanité qui n’a plus grand chose à faire et se concentre sur son confort et sa productivité au travail.

Sortie le 25 octobre 2023.

Les feuilles mortes  

Synopsis 

Deux personnes solitaires se rencontrent par hasard une nuit à Helsinki et chacun tente de trouver en l’autre son premier, unique et dernier amour. Mais la vie a tendance à mettre des obstacles sur la route de ceux qui cherchent le bonheur.

Critique 

Ali Kaurismaki est une référence, le porte étendard du cinéma finlandais, régulièrement sélectionné et primé à Cannes. Son film montre en toute simplicité, mais avec beaucoup de poésie, le rapprochement de deux êtres, la naissance d’une relation. La réalisation de Kaurismäki nous plonge dans un quotidien simple et mélancolique, qui ne cherche jamais à trop tirer sur la corde sensible et privilégie la tendresse et l’humour pour exprimer ses idées et son regard sur la société.

Le rythme est lent, ce n’est pas forcément mon univers, mais j’ai enfin pu approcher l’oeuvre d’un cinéaste reconnu. A mes yeux, cela reste un petit film, pas désagréable, qui mêle habilement ironie et sincérité. Malgré la noirceur du monde actuel, il y a encore de la place pour l’humanisme et l’amour.

Sortie le 20 septembre 2023.

La zone d’intérêt

Synopsis 

Le commandant d’Auschwitz, Rudolf Höss, et sa femme Hedwig s’efforcent de construire une vie de rêve pour leur famille dans une maison avec jardin à côté du camp.

Critique 

La zone d’intérêt est unique par son approche très particulière de raconter l’Holocauste du point de vue Nazi. Il est remarquablement limité, produit de manière diabolique et ne ressemble à aucun autre film sur l’Holocauste à ce jour.

Le dernier film de Jonathan Glazer s’inscrit dans la continuité de son travail précédent. Alors qu’Under The Skin a été acclamé par une bonne partie de la presse et des cinéphiles, je n’ai pas du tout réussi à rentrer dedans. Je suis resté hermétique à l’atmosphère particulière de ses séquences, à cette lenteur froide, quasi clinique. Et La zone d’intérêt poursuit dans ce style, détournant un genre pour proposer une nouvelle histoire dérangeante.

La banalité de l’intrigue, le quotidien de la famille du commandant d’Auschwitz, entre picnic, sorties à la rivière et barbecue au bord de la piscine, est une approche très intéressante car on est forcés de se reconnaitre dans cette routine. Le film nous montre la “normalité” de la vie de cette famille. C’est fort, en théorie,… mais cela peut aussi être particulièrement ennuyeux. Les effets et morceaux de films un peu expérimentaux hypnotisent mais n’apportent pas vraiment une épaisseur supplémentaire. Ils permettent simplement de captiver un peu le spectateur entre deux séquences d’ennui.

La Zone d’intérêt n’est pas un film facile à regarder, mais il examine la noirceur de l’humanité d’une manière très neutre, subtile, et nous rappelle à quel l’horreur humaine est souvent silencieuse et froide.

Sortie le 31 janvier 2024.

She came to me

Synopsis 

Un compositeur en proie au syndrome de la page blanche retrouve l’inspiration après une rencontre inattendue. L’amour survient toujours là où on ne l’attend pas…

Critique 

She came to me, 7ème long métrage de Rebecca Miller, présente un casting impeccable et une intrigue très sympathique. Si les personnages de Peter Dinklage, et des sublimes Anne Hathaway et Marisa Tomei valent amplement le détour, nous avons été moins convaincus par l’intrigue amoureuse entre deux adolescents, mal imbriquée au reste de l’histoire.

Nous gardons le souvenir d’une agréable comédie chorale avec New York en toile de fond, pourvue d’une note d’étrangeté bienvenue. La singularité des personnages (le compositeur d’opéra en panne d’inspiration, la psychiatre bourrée de tocs, la capitaine de remorqueur accroc à l’amour) donnent à l’ensemble un charme certain, malgré peut-être quelques inconsistances et intentions manquées. 

Le jeu de la reine  

Synopsis 

Cathe­rine Parr est la sixième femme du roi Hen­ri VIII, dont les pré­cé­dentes épouses ont été soit répu­diées, soit déca­pi­tées, une seule étant décé­dée des suites d’une mala­die. Avec l’aide de ses dames de com­pa­gnie, elle tente de déjouer les pièges que lui tendent l’évêque, la cour et le roi…

Critique 

Oui, je sais : La première chose que l’on se dit en lisant ce synopsis du jeu de la reine, c’est encore un film historique sur la monarchie anglaise ! On ne peut s’empêcher de penser à deux sœurs pour un roi, Elizabeth, ou à la série The Tudors. 

D’autant plus qu’en lisant le résumé on s’attend à un peu d’action, de complots, bref, d’intrigues un peu plus intéressantes que ce qui nous est proposé. 

Le film se suit gentiment et l’on réussit à s’attacher au personnage de Catherine Parr. On a peur pour elle, on a envie qu’elle s’en sorte mais notre enthousiasme s’arrête là. Cette partie de l’Histoire avec un grand H n’étant pas particulièrement connue, du moins pour ma part, et je n’avais aucune idée de comment sa vie s’était terminée et le suspens restait donc entier. 

Le film manque cependant de rythme et l’on attend qu’il se passe quelque chose de plus. 

Côté acteurs, passez votre chemin si vous êtes des fans de Jude Law et Alicia Vikander : on les reconnaît à peine tellement ils sont grimés. Ils sont bons et c’est un peu dommage de prendre des acteurs connus pour les rendre méconnaissables.

Le jeu de la reine est à réserver pour les accros de la dynastie Tudor…

Sortie en mai 2023 

Cyrano

Synopsis 

Trop timide pour cour­ti­ser Roxanne lui-même, Cyra­no de Ber­ge­rac aide le jeune Chris­tian à gagner le cœur de la jeune fille à tra­vers des lettres d’a­mour qu’il a écrites.

Critique 

Ce Cyrano avec Peter Dinklage est une adaptation de la comédie musicale… elle même relecture de la pièce mythique du théâtre français, Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand. Révision de la particularité de Cyrano, qui troque son nez pour une petite taille, on ne peut qu’être attendri par cette version signée Joe Wright. 

Évidemment, rentrer dedans est dur ! On connaît la pièce en français, alors l’entendre chantée en anglais bouleverse nos habitudes. Néanmoins, l’adaptation s’en tire avec quelques honneurs. On pense à une ouverture dans un rythme très hip-hop rappelant les grands moments de Lin-Manuel Miranda ou a des chorégraphies enflammées dans la caserne (avec une caméra inventive et brillante).

Malheureusement, cela ne compense pas tout. Si les décors carton-pâte sont réussis, la performance vocale de Dinklage laisse à désirer et difficile d’adhérer à la relecture des derniers moments de Cyrano. 

Au final, on retrouve donc un film attachant, montrant un vrai amour des personnages et de l’histoire, avec une réelle volonté de bien faire. Donc oui, il y a bien quelques défauts, mais rien ne justifiant de passer à côté du film si l’occasion se présente.

May December

Synopsis 

Pour pré­pa­rer son nou­veau rôle, une actrice célèbre vient ren­con­trer celle qu’elle va incar­ner à l’écran, dont la vie sen­ti­men­tale a enflam­mé la presse à scan­dale et pas­sion­né le pays vingt ans plus tôt.

Critique 

Vous souvenez vous des téléfilms de TF1 dans les années 90? Ils racontaient souvent des faits divers un peu glauques, un chouïa voyeuristes et parfois inspirée d’une histoire vraie. Je me souviens très bien avoir vu un de ces téléfilms sur l’affaire Mary Kay Letourneau, cette prof qui avait eu une relation avec un de ses élèves puis eu son bébé en prison. 

May December s’inspire très clairement mais aussi plus librement de cette affaire.

On a même parfois cette impression que Todd Haynes assume le côté téléfilms avec certains plans et surtout cette musique dramatique qui revient tout au long du film. Une musique qui nous fait penser que quelque chose de terrible va se passer. Spoiler alert : malheureusement il ne se passera rien de tragique. 

Le réalisateur nous montre la vie de ce couple, toujours ensemble après 23 ans et deux enfants. A l’occasion d’un film sur la période de leur relation interdite, Natalie Portman – qui a le même âge que le jeune époux de Julianne Moore – débarque pour s’imprégner du personnage en mode de actor’s studio. what could go wrong…? 

Au final, le film nous laisse sur notre faim. On apprécie le moment passé avec ces deux actrices. Mais l’introspection du couple bien qu’intéressante, reste assez superficielle. De même pour la personnalité de Gracie dont on perçoit la santé mentale fragile. 

Si ce n’était le casting, on sortirait assez de ce film qui ne serait que la suite d’un téléfilm du mardi après midi. 

Sortie le 24 janvier 2024