Analyse de l’épisode Common People (Des gens ordinaires) de Black Mirror
Synopsis de Common People (Des Gens ordinaires)
Mike et Amanda Waters forment un couple irlandais parfaitement ordinaire. Lui est professeur, elle enseignante, et ils vivent une existence paisible jusqu’à ce que le diagnostic tombe : Amanda souffre d’une tumeur au cerveau inopérable.
Face à cette sentence de mort, une lueur d’espoir apparaît sous la forme de Rivermind, une start-up révolutionnaire proposée par Gaynor (Tracee Ellis Ross). Cette technologie promet de sauver Amanda en téléchargeant sa conscience dans un dispositif numérique, lui permettant de continuer à vivre… moyennant un abonnement mensuel.
Ce qui commence comme une solution miracle se transforme progressivement en cauchemar financier. Les tarifs de Rivermind ne cessent d’augmenter, forçant Mike à s’endetter toujours plus pour maintenir sa femme « en vie ». Mais peut-on vraiment parler de vie quand celle-ci dépend d’un algorithme et d’un compte en banque ?
Explication de la fin de l’épisode
La chute de « Des gens ordinaires » nous laisse dans un état de sidération. Après avoir tout sacrifié pour maintenir Amanda dans son meilleur état, Mike découvre la véritable nature du système Rivermind. L’Amanda qu’il chérit et pour laquelle il s’est ruiné n’est plus vraiment Amanda tellement elle est dépendante de l’influence de Rivermind.
Le coup de grâce arrive quand on comprend que Rivermind fonctionne comme un modèle économique classique d’abonnement : plus vous payez, mieux votre proche « fonctionne ». Les versions les moins chères proposent des interactions limitées, des bugs, des dysfonctionnements… et de la pub ! Pour avoir accès à une version « premium » de sa femme mourante, Mike doit donc sacrifier sa vie et hypothéquer son futur.
La scène finale nous montre Amanda et Mike, ruinés, face à un ultimatum : accepter une version dégradée d’Amanda ou la perdre définitivement. Dilemme terrifiant par sa cruauté mathématique et qui au final, verra les deux amants mourir. Du moins c’est ce que l’on suppose en voyant Mike fermer la porte, armé d’un couteau…on comprends qu’il va se suicider en live streaming et offrir à ses spectateurs le spectacle ultime.
Analyse de la fin de Common People (Des Gens ordinaires)
Cette conclusion révèle le génie cynique de Charlie Brooker : transformer l’amour conjugal en modèle économique. On pourrait y voir une critique directe de Netflix et de sa logique d’abonnement – d’ailleurs, Brooker lui-même semble faire un « doux coup de pied au cul » à la plateforme qui diffuse sa série (coucou les prix qui augmentent et la pub de plus en plus présente).
Mais c’est bien plus profond que ça. « Des gens ordinaires » interroge notre rapport à la marchandisation de l’émotion. Dans notre société où tout devient service, pourquoi la mort échapperait-elle à cette logique ? L’épisode nous confronte à une question terrifiante : combien vaut une vie ? Et surtout, combien sommes-nous prêts à payer pour l’illusion de garder nos proches ?
Il y a quelque chose de particulièrement cruel dans les options « premium ». En effet, avec le bon abonnement, l’Amanda numérique est plus parfaite que l’originale. Rivermind ne se contente pas de préserver, elle améliore. Cette version 2.0 d’Amanda est plus attentionnée, plus compréhensive, plus aimante. Comment Mike pourrait-il choisir de l’abandonner pour retourner à une « version » totalement imparfaite, passant sa vie à dormir et faire de la publicité ?
La fin suggère aussi une interprétation encore plus sombre : et si Amanda était déjà morte depuis longtemps, et que toute cette spirale n’était qu’une manipulation psychologique de Rivermind pour extorquer de l’argent à un homme en deuil ? Cette lecture transformerait l’épisode en une critique féroce de notre vulnérabilité face aux géants technologiques.
« Des gens ordinaires » fonctionne comme un avertissement sur les dérives possibles de notre époque. Dans un monde où la santé se digitalise, où les abonnements régissent nos vies, cet épisode nous demande : êtes-vous prêts à vous endetter pour l’éternité au nom de l’amour ?
