Les films en première à Deauville 2024

Image le Robot Sauvage

Car le Festival du Cinéma Américain de Deauville, ce n’est pas que la compétition (retrouvez-la ici). En effet, de nombreux films sont également présentés en avant-première. Vous êtes prêts ? Voici nos critiques de quelques premières présentées lors de la 50e édition du festival !

Beetlejuice Beetlejuice de Tim Burton

Affiche du film Beetlejuice Beetlejuice

Synopsis

Après une ter­rible tra­gé­die, la famille Deetz revient à Win­ter River. Tou­jours han­tée par le sou­ve­nir de Beet­le­juice, Lydia voit sa vie bou­le­ver­sée lorsque sa fille Astrid, ado­les­cente rebelle, ouvre acci­den­tel­le­ment un por­tail vers l’Au-delà. Alors que le chaos plane sur les deux mondes, ce n’est qu’une ques­tion de temps avant que quelqu’un ne pro­nonce le nom de Beet­le­juice trois fois et que ce démon far­ceur ne revienne semer la pagaille…

Critique

Beetlejuice Beetlejuice est une suite qui réussit à retrouver l’esprit déjanté du film original, tout en s’inscrivant dans la continuité de l’univers créé par Tim Burton. Le film s’ouvre sur un nouveau drame familial pour les Deetz, mais c’est surtout Astrid, la fille de Lydia, qui devient l’élément déclencheur de ce chaos surnaturel en ouvrant accidentellement un portail vers l’Au-delà. Cette ouverture pose les bases pour le retour du plus espiègle et farceur des démons, Beetlejuice, prêt à faire à nouveau des siennes.

L’une des forces majeures du film réside dans son approche « back to basics ». En délaissant les effets numériques envahissants qui marquent beaucoup de productions contemporaines, Beetlejuice Beetlejuice revient à une esthétique plus artisanale, rappelant les débuts de Burton. Le charme des décors tangibles, des maquillages excentriques et des effets pratiques renforcent ce sentiment de retrouver l’univers loufoque et grinçant qui avait tant séduit dans le film de 1988. Le résultat est une œuvre visuellement plus brute, mais qui résonne avec nostalgie pour les fans de la première heure.

Le plaisir est également palpable chez les acteurs, et Michael Keaton, dans le rôle-titre, est une fois de plus irrésistible. Son Beetlejuice est toujours aussi imprévisible et jubilatoire, une figure anarchique qui semble parfaitement à sa place dans ce monde à moitié réel, à moitié spectral. Keaton, tout comme les autres membres du casting, semble prendre un plaisir évident à revisiter ce personnage, et cet enthousiasme se transmet directement au public.

Cependant, si cette suite ravira par son respect de l’esprit originel et son ton décomplexé, la magie de la découverte n’est plus aussi présente. L’effet de surprise qui accompagnait le premier Beetlejuice a laissé place à une familiarité avec cet univers décalé. Cela ne rend pas le film moins agréable, mais l’impact n’est plus aussi saisissant qu’il l’était à l’époque.

En somme, Beetlejuice Beetlejuice s’avère être une suite très réussie, pleine d’énergie et de moments délirants, qui réussit à capturer la simplicité et la folie du premier opus. 

Sortie en salle le 11 septembre 2024

Speak No Evil de James Watkins

Affiche de Speak No Evil

Synopsis

Une famille amé­ri­caine passe le week-end dans la pro­prié­té de rêve d’une char­mante famille bri­tan­nique ren­con­trée en vacances. Mais ce séjour qui s’annonçait idyl­lique se trans­forme rapi­de­ment en atroce cauchemar.

Critique

Speak No Evil s’impose comme un thriller oppressant qui renverse les codes classiques du home invasion pour offrir une expérience où la tension s’installe progressivement, nourrie par une série de détails sinistres disséminés tout au long du film. Le spectateur comprend assez vite que la charmante famille britannique, hôtesse de ce week-end en apparence idyllique, cache un terrible secret, et que le cauchemar ne fait que commencer pour le couple londonien en quête d’évasion.

La force de Speak No Evil est la gestion impeccable de cette tension. Le réalisateur distille lentement des indices jusqu’à une explosion finale dans la dernière demi-heure, où l’horreur éclate au grand jour  (ou plutôt en pleine nuit) et laisse place à une lutte sanglante pour la survie. Le film bascule alors dans une violence brute et frontale, notamment lors d’une scène finale marquante, aussi choquante qu’efficace.

Cependant, là où le film suscite plus d’interrogations, c’est sur son message. James Watkins semble vouloir critiquer une certaine élite urbaine, en particulier ces « bobos » citadins, écologiquement conscients, roulant en Tesla et adeptes de discours vertueux. Pourtant, cette critique manque de clarté et semble s’embrouiller au fil du récit. L’opposition entre les citadins aisés et les ruraux est bien présente, mais elle semble presque accessoire face à l’horreur psychologique qui se joue. Au final, le message socio-politique est confus, laissant place à une simple démonstration de folie humaine à travers la figure du paysan psychopathe.

La structure du film reste toutefois solide grâce à sa forme. En dépit de ses failles narratives, Speak No Evil ne se prend jamais trop au sérieux, assumant un côté politiquement incorrect, notamment dans sa conclusion brutale. Ce ton décalé apporte un souffle de fraîcheur au genre, tout en inversant intelligemment certains stéréotypes. Ici, le couple londonien voit ses dynamiques traditionnelles bouleversées : c’est la femme, à l’origine de la trahison dans le couple mais résiliente, qui prend le contrôle lors de la bataille finale, tandis que l’homme, plus effacé et manquant de confiance en lui, se trouve relégué au second plan.

En résumé, malgré un message confus, Speak No Evil parvient à maintenir l’intérêt grâce à une tension bien maîtrisée et une conclusion percutante. Le réalisateur semble moins préoccupé par la cohérence de son propos que par la volonté de bousculer les attentes et d’offrir une expérience de cinéma viscérale et sans compromis.

Sortie en salle le 18 septembre 2024

Lee Miller de Ellen Kuras

Affiche de Lee Miller avec Kate Winslet

Synopsis

L’incroyable vie de Lee Mil­ler, ex-modèle pour « Vogue » et muse de Man Ray, deve­nue l’une des pre­mières femmes pho­to­graphes de guerre. Par­tie sur le front et prête à tout pour témoi­gner des hor­reurs de la Seconde Guerre, elle a, par son cou­rage et son refus des conven­tions, chan­gé la façon de voir le monde.

Critique

Lee Miller est un film qui brille par la puissance de son sujet et par l’interprétation magistrale de Kate Winslet, qui incarne avec une intensité remarquable la célèbre photographe et ex-modèle devenue reporter de guerre. À travers l’histoire d’une femme qui a refusé les conventions, le film explore non seulement les horreurs de la Seconde Guerre mondiale mais aussi la transformation d’une artiste en témoin essentiel de l’histoire, bouleversant notre regard sur le monde.

Le film retrace la trajectoire incroyable de Lee Miller, passant de l’univers glamour de la mode et de l’art, où elle fut la muse de Man Ray, à celui bien plus sombre du front de guerre. Ce basculement est raconté avec rigueur, parfois même de manière un peu académique, ce qui peut donner l’impression que le film suit un cheminement classique des biopics. Cependant, ce traitement traditionnel n’empêche pas l’émotion de s’imposer, surtout grâce à la personnalité fascinante de Miller et à sa lutte pour se frayer un chemin dans un monde dominé par les hommes.

Kate Winslet, dans un rôle taillé sur mesure pour elle, incarne à merveille cette femme complexe, à la fois vulnérable et résolument forte. Son interprétation donne vie à une Lee Miller qui défie toutes les attentes : une femme brisée par les horreurs qu’elle a vues mais qui, paradoxalement, puise dans cette souffrance une force nouvelle pour documenter l’atrocité avec un regard singulier. C’est cette dualité qui rend le personnage si captivant à l’écran.

Si le film peut parfois sembler manquer de prise de risques formels, la richesse du sujet et la profondeur du personnage suffisent à en faire un biopic captivant. Lee Miller n’est pas seulement un hommage à une femme d’exception, mais aussi une réflexion sur le rôle du regard féminin dans un monde de guerre et de destruction.

Sortie en salle le 9 octobre 2024

Le Robot Sauvage de Chris Sanders

Affiche du film le Robot Sauvage

Synopsis

L’incroyable épo­pée d’un robot – l’u­ni­té ROZZUM 7134 alias « Roz » – qui après avoir fait nau­frage sur une île déserte doit apprendre à s’a­dap­ter à un envi­ron­ne­ment hos­tile en nouant petit à petit des rela­tions avec les ani­maux de l’île. Il finit par adop­ter le petit d’une oie, un oison, qui se retrouve orphelin.

Critique

Le Robot Sauvage réussit à se démarquer dans le genre déjà bien exploré des récits de robots grâce à une approche à la fois intime et profondément émotive. L’histoire de Roz, cette unité robotique qui se retrouve échouée sur une île sauvage et doit apprendre à vivre parmi les animaux, n’est pas sans rappeler des œuvres comme Wall-E ou Le Géant de Fer. Cependant, cette adaptation parvient à trouver sa propre voix en déplaçant l’action dans un cadre naturel et en explorant le lien entre technologie et environnement, un thème universel et pourtant renouvelé ici.

Ce qui pourrait apparaître comme un concept déjà vu prend une dimension nouvelle grâce au cadre isolé de l’île et à l’accent mis sur la relation de Roz avec les animaux, en particulier avec l’oison orphelin qu’elle adopte. Le film prend le temps de développer ces liens de manière subtile, sans jamais sombrer dans le pathos facile. Les émotions sont soigneusement dosées, rendant l’attachement progressif de Roz aux créatures de l’île à la fois crédible et profondément touchant. Cette sensibilité est l’un des points forts du film, qui parvient à émouvoir sans manipuler, ni forcer la main du spectateur.

Sur le plan visuel, Le Robot Sauvage brille également. L’animation,  inspirée par le cell-shading, avec ses couleurs douces et ses contours légèrement esquissés, donne au film un charme unique et une esthétique originale. Ce choix artistique apporte une touche de fraîcheur et s’intègre parfaitement à l’atmosphère naturelle de l’île, renforçant le contraste entre la froideur mécanique de Roz et la chaleur organique de son environnement. C’est un style qui fait mouche et qui permet au film de se distinguer visuellement dans un paysage souvent dominé par des animations plus lisses.

En somme, si l’histoire de base ne révolutionne pas le genre, Le Robot Sauvage séduit par la manière dont il réinvente des thèmes familiers avec une tendresse sincère et un style visuel audacieux. C’est un film qui saura toucher aussi bien les enfants que les adultes, grâce à une gestion intelligente des  émotions et à une animation à la fois soignée et inventive. Une belle réussite qui prouve que même les récits de robots peuvent encore nous surprendre lorsqu’ils sont portés par un cœur aussi grand que celui de Roz.

Sortie en salle le 9 octobre 2024

Total
0
Partages
11 commentaires
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Article précédent
Image de In the Summers

Les films en compétition de Deauville 2024

Articles sur le même sujet