Déjà au premier abord “Toni Erdmann” a de quoi intriguer. Une comédie de 2h36 (alors que le genre est souvent associé à un format plus bref, la plupart du temps disons d´1h30) : qu´est-ce que c’est que ce truc ? Cela dit, prenons garde aux étiquetages trop prompts. Les grands films sont irréductibles aux catégories, et “Toni Erdmann” est bien un grand film, mystérieusement absent du dernier palmarès cannois malgré ses qualités et sa singularité très élevées.
Synopsis
Winfried Conradi, professeur de musique sexagénaire, désire renouer avec sa fille et lui transmettre notamment son sens de l´humour. Il va s´y prendre d´une manière très personnelle…
Critique
On serait tenté d’appeler le film “comédie” tant l’on y rit d’un rire libératoire devant des situations burlesques, inattendues, énormes. En même temps, et comme, serait-on tenté de dire, toutes les grandes comédies, “Toni Erdmann” est empreint d’une profonde mélancolie. Il est léger et profond, joyeux et cru, réaliste et dingue, il est comme la vie. C’est un geyser, une tornade, une claque. Il parvient à créer une forme de suspense sentimental, conférant une ampleur étonnante à une simple relation père-fille.
À partir d’une trame apparemment modeste – un père veut se rapprocher de sa fille et lui transmettre quelque chose avant sa mort – il brode, tisse, surprend, crée des scènes de grand cinéma où il se passe vraiment quelque chose d’inédit. Il parle aussi d’une race en extinction – celle des rêveurs et des farceurs évoluant au sein d’un monde froid, capitaliste et calculateur strictement dénué d’humour. En filigrane : un portrait de la Roumanie entre modernité et tradition, l’Europe et la mondialisation, l’exploitation des petits par les puissants, le sexe triste des femmes mais aussi des hommes d´affaires englué(e)s dans un néant sentimental profond…
Des défauts, certes, il en a, sa mise en scène est dans l’ensemble assez rudimentaire, mais ce n’est pas ça qui importe, ce qui importe c’est cette singularité inouïe, cette intensité émotionnelle également assurée par des comédiens de grand talent – Peter Simonischek et Sandra Hüller.
Le film semble dérouler un programme – en bref une succession de canulars de plus en plus osés -, mais la prouesse est que, même à l’intérieur de ce programme, il arrive à nous surprendre, à nous cueillir, et à instaurer, avec la complicité du spectateur, un monde où la farce devient reine, le temps au moins d’un film. A 39 ans Maren Ade livre ainsi un ovni qui, s’il se frottera peut-être quand même à quelques sceptiques indécrottables, devrait fédérer un public élargi, séduire une très grande partie de la presse, et obtenir indéniablement, à défaut d’une Palme réelle, la Palme du cœur.
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