Une paire d’années après le pop et délirant Kaboom (notre critique est toujours ici), Gregg Araki revient sur le devant de la scène (et des festivals, comme celui de Deauville) avec White Bird. Plus sage en apparence, qu’en est-il dans la réalité ?
Synopsis
Kat Connors a 17 ans lorsque sa mère disparaît sans laisser de trace. Alors qu’elle découvre au même moment sa sexualité, Kat semble à peine troublée par cette absence et ne paraît pas en vouloir à son père, un homme effacé. Mais peu à peu, ses nuits peuplées de rêves vont l’affecter profondément et l’amener à s’interroger sur elle-même et sur les raisons véritables de la disparition de sa mère…
Critique
Chaque réalisateur a son sujet de prédilection, et celui de Gregg Araki est définitivement le même qu’un certain Larry Clark : l’adolescence, la découverte de la sexualité et le passage difficile à l’âge adulte. White Bird ne déroge définitivement pas à la règle, nous présentant l’adolescence de Kat Connors au travers d’un évènement qui bouleversera sa vie : La disparition mystérieuse de sa mère.
Voyageant entre le quotidien de Kat, ses questionnements, ses rêves, ses séances de psy, sa relation avec son père, ses amis, et évidemment ses amants, White Bird cherche à nous présenter le monde de son point de vue. Sans chercher vraiment à élucider le mystère de la disparition de sa mère, Kat est traumatisée par cela et semble vouloir se le cacher à elle même comme ses rêves nous l’indiquent.
Au travers de Kat, le spectateur observe aussi un monde, celui de la fin des années 80 et du début des années 90, et Araki nous décrit sa vision du rêve américain de manière finalement assez froide par rapport à ce que l’on connait de lui. Attention, cela reste un portrait très négatif de ces banlieues américaines et de leurs médiocrités comme avait pu nous le montrer Sam Mendes dans American Beauty. D’ailleurs, les deux films en partagent les mêmes sources : la frustration du rêve américain (frustration parfaitement incarnée par Eva Green) et ce sexe, toujours en embuscade, avec ses découvertes, ses envies et ses excès.
Étonnement, Araki reste très sobre sur les scènes qui pourraient être terriblement explicites, mais c’est aussi sa volonté : nous présenter ses scènes du point de vue de Kat, jeune adolescente, et non du sien, réalisateur dans la cinquantaine. Araki nous livre ici un film plus “adulte” qu’à l’accoutumée, loin des folies de ses précédentes réalisations.
Parlant de Kat, l’interprétation de Shailene Woodley est bonne sans non plus être transcendante, tout comme les autres acteurs, bons dans leurs rôles. Seule Eva Green sort vraiment du lot, nous présentant une mère qui a perdu ses idéaux, ne sachant où se positionner dans la vie entre la parfaite mère de famille et la femme qui fait ce qu’elle veut. La complexité et la tragédie de ce personnage, au cœur du film, est certainement ce qui nous rapproche d’ailleurs le plus d’un American Beauty.
Enfin, il est impossible de ne pas parler de la fin qui, sans trop en révéler, saura étonner et plaire. Visiblement, sur le concept de twist final, Araki n’a définitivement pas perdu de sa superbe, et s’amuse à jouer avec le spectateur.
White Bird est donc un film mélangeant bien les genres, entre le drame familial des “suburbs” américaines, l’enquête policière et le film d’adolescence. Très sage venant d’Araki, mais ce dernier nous le promet : Il garde sa folie, et rien ne dit que son prochain film ne sera pas tout aussi pop et déjanté que Kaboom !