On ne peut pas dire qu’on a l’habitude de films comme Free Fire dans le paysage cinématographique d’aujourd’hui. Mais c’est la marque de Ben Wheatley : déjà en 2015, le cinéaste se démarquait avec High-Rise, ce film absurde, qu’on aime ou qu’on déteste. C’est pareil ici. Pas de demi-mesures, car pour aimer Free Fire, il faut prendre le parti du cinéaste et accepter de voir un exercice de style très travaillé qui frôle parfois le non-sens.
Synopsis
A Boston, à la fin des années 70, deux bandes de malfrats se retrouve dans un entrepôt désert pour conclure une vente d’armes clandestines. Un détail suffit pour que la transaction dégénère et vire à l’affrontement. L’entrepôt devient alors le théâtre de leur baston et une zone de tir libre.
Un pari réussi
Le pari est plutôt réussi et s’avérait difficile. Les personnages ne sont spécialement attachants et on ne connaît rien d’eux, si ce n’est qu’ils représentent chacun un archétype. Il y a l’idiot, le mec branché, le junkie, la bad girl, le mec bien sous tous rapports qui forcément s’intéresse à la bad girl, le geek à lunettes, enfin l’autrichien-suisse (on ne sait pas trop) rentre-dedans. Bref, une vraie brochette un peu lourdingue qui n’aurait peut-être pas fonctionné sans de très bons acteurs.
Car Free Fire est essentiellement un film de scénario et un des meilleurs scénars de comédie de l’année, où chaque réplique est hilarante et justement relevée par le jeu exceptionnel de ces acteurs qui usent de tout leur savoir-faire. On a le droit à la merveilleuse Brie Larson (actrice oscarisée de Room), Cilian Murphy (la série Peaky Blinders) ou encore Sharlto Copley (Distict 9).
Mais surtout, le film doit être vu pour la prestation mémorable de Sam Riley, connu pour avoir joué Ian Curtis dans le film Control, ici complètement fendard dans le rôle du junkie qui tourne mal jusqu’à faire feu sur tout ce qui bouge, sans distinction.
Une comédie absurde
Car c’est là qu’est le non-sens. Bien qu’il y est deux groupes rivaux, plus le film passe moins on sait sur qui on tire, allié ou ennemi. On tire parce qu’on en a envie, pour se défouler, rien que pour entendre le bruit des balles. Même le comportement des personnages est étrange. Ils risquent leur vie, ils le savent et pourtant, tout cela ne semble être qu’un jeu ou une forme de catharsis. Ils continuent de fumer leur clope comme si de rien n’était, comme s’ils étaient autour d’un verre entre potes dans un bar, comme si la vie n’avait pas de sens pour eux. La seule chose qui compte peut-être, c’est le fric : le but étant d’être le dernier à se barrer avec la mallette contenant le cash et ce au prix de sa vie.
Le film, stylistiquement, rappelle Kingsman de Matthew Vaughn car comme ce dernier, il exagère tout et ce à une fin comique. Il attirera aussi les fans de Quentin Dupieux dont les films ont la même fonction : ce sont des films intéressants stylistiquement, bien écrits mais on se demande parfois pourquoi ils sont là et ce qu’ils veulent nous dire.
Malgré son absurdité et sa durée (courte, 1h30), Free Fire est un film très travaillé, jusque dans ses moindres détails. Tous les plans sont là pour accentuer telles ou telles réactions des personnages, la bande son donne un côté vintage et branché au tout et la photographie (très belle) sublime le film avec ses couleurs et nuances très seventies. Il y a un intérêt particulier apporté au son : chaque tir de balle est différent et au bout de trente minutes, le film se transforme en symphonie de mitraillettes. Plutôt original, non ?
Si Free Fire n’est pas le meilleur film de gangsters ou film d’action de l’année, c’est néanmoins une excellente comédie assez jouissive et déjantée qu’on découvre avec plaisir et devant laquelle on passe un très bon moment.