Quand un film français atypique sort dans les salles, et qu’en plus, il évoque fortement des oeuvres comme Le géant de fer de Brad Bird et Transformers de Michael Bay, nous sommes forcément très intrigués dans l’équipe de rédaction d’Oblikon.
J’ai eu le chance découvrir Jumbo, réalisé par Zoé Wittock, en avant-première dans la cadre du Champs Elysées Film Festival, qui s’est exceptionnellement déroulé online du 09 au 16 juin 2020. Je vous propose aujourd’hui une analyse sur ce premier film certes imparfait, mais plein de belles idées et porté par quelques séquences vraiment très réussies, notamment sur le plan esthétique.
Synopsis du film
Jeanne, une jeune femme timide, travaille comme gardienne de nuit dans un parc d’attraction. Elle vit une relation fusionnelle avec sa mère, l’extravertie Margarette. Alors qu’aucun homme n’arrive à trouver sa place au sein du duo que tout oppose, Jeanne développe d’étranges sentiments envers Jumbo, l’attraction phare du parc.
Amour métallique
Comme dans les films évoqués pus haut, le personnage principal va développer une relation secrete avec “une créature” dont les autres n’ont pas conscience. Mails il y a plusieurs différences notables. La première est que le personnage de Jeanne, incarnée par l’actrice Noémie Merlant, est une jeune femme, et non pas un jeune homme. Le point de vue est ainsi différent, et là ou les personnages des productions américaines vont s’émanciper en devenant des héros, Jeanne va s’émanciper de façon plus réaliste, plus authentique, en explorant ses désirs et ses émotions. L’âge de son personnage n’est jamais donné, ce qui créé encore un peu plus d’étrangeté. A-t’elle 18 ans ou 28 ans, nous ne le saurons jamais dans le film, ce qui lui donne une position de femme enfant ambiguë.
Heureusement, pas de male gaze au programme, et si la nudité est au programme elle sert le propos. D’abord non sexualisé, le corps de Jeanne va s’érotiser au fur et à mesure du développement de sa relation avec Jumbo.
Les séquences de connexion avec Jumbo sont parmi les plus réussies du film, avec, souvent, une photographie inspirée. Ce n’est hélas pas toujours le cas, et l’esthétique est assez inégale d’une séquence à l’autre, probablement pour des questions budgétaires. C’est d’autant plus dommage qu’on sent chez Zoé Wittock de vraies idées esthétiques, par forcément gratuites, mais au service de la narration. Espèrons qu’elle ait plus de moyens pour son prochain projet.
Pour ce qui est de l’intrigue du film, c’est également irrégulier. Là encore, il y a comme un décalage entre certains évènements, certaines séquences. Les dialogues ne sont pas forcément le point fort du film et l’alternance entre moments réalistes et instants plus étranges est déroutant. Les passages les plus réussis du film sont finalement ceux ou les personnages comme l’autrice acceptent de laisser libre court à leur folie douce, quitte à en faire “un peu trop”, frôler le ridicule et le kitch.
Une fin en toute simplicité
Comme évoqué plus haut, le film est porté par plusieurs moments frustrants, d’autre magiques. C’est cliché ce que je vais dire, mais la sensibilité du spectateur aura vraiment un impact sur son ressenti.
A un moment du film, j’ai cru que ça allait finir en mode Carrie. Une oeuvre écrite par un homme (Stephen King), adaptée au cinéma par un homme (Brian De Palma), à une époque ou le regard des hommes l’emportait.
J’ai tendance à croire que j’ai une sensibilité plus “féminine” que la plupart des hommes et au final, j’ai d’abord pensé que le film prendrait une direction plus violente, mais pas forcément plus radicale et audacieuse.
Zoé Wittock fait un choix plus fou, plus audacieux, casse gueule, qui va laisser pas mal de monde de côté, mais qui va aussi en réjouir plus d’un(e). Une vision plus optimiste, plus bienveillante qui nous ramène aux récits de contes de fée de notre enfance, avec une innocence évidente.
Au final, on ne sais jamais vraiment si Jumbo est “vivant” ou si tout est dans la tête de Jeanne. Le film choisit en tout cas s’accepter, de reconnaitre, d’apprécier et de respecter cet amour, ce ressenti, sans jugement.
En conclusion, malgré un pitch de départ assez fou, Jumbo n’a pas grand chose à voir avec un film de Michael Bay et propose, malgré quelques faiblesses, un film plaisant à suivre, et la découverte d’une autrice / réalisatrice à suivre.