Notre petite sœur (Umimachi Diary en VO) du réalisateur japonais Kore Eda est sélectionné en compétition officielle au 68e festival de Cannes. Découvrez notre critique du film ci-dessous.
Synopsis
Trois sœurs, Sachi, Yoshino et Chika, vivent ensemble à Kamakura. Par devoir, elles se rendent à l’enterrement de leur père, qui les avait abandonnées une quinzaine d’années auparavant. Elles font alors la connaissance de leur demi-sœur, Suzu, âgée de 14 ans. D’un commun accord, les jeunes femmes décident d’accueillir l’orpheline dans la grande maison familiale…
Critique du film de Kore Eda
J’ai découvert Kore Eda il y a quelques années avec Nobody knows. J’avais été impressionné par ce très beau film, très dur aussi, qui m’avait fait vivre des émotions très fortes, un peu comparables à celles éprouvées devant Le tombeau des lucioles.
J’ai redécouvert Kore Eda il y a deux ans avec Tel père tel fils, l’un des films qui m’a le plus marqué ces dernières années. J’avais 29 ans, pas d’enfant, et pourtant, pour la première fois devant un film, je me mettais à la place du père plutôt que du fils, surtout hanté par la peur de ressembler à cet homme trop exigeant et froid.
Le nouveau film de Kore Eda, Notre petite sœur, était l’une de mes grandes attentes du festival. Ce n’est, au final, pas un très grand film, mais c’est le cinéma que j’aime, un cinéma centré sur l’humain, ses émotions, ses faiblesses, ses peurs, ses erreurs et surtout sa bonté. Car Kore Eda est humaniste, il croit vraiment en la bonté de l’homme et cela se sent au travers de chacun des personnages du film.
Si les enfants, Suzu mais aussi ses amis, semblent encore préservés par l’inexpérience et toujours plein d’innocence, les trois grandes sœurs, et la plupart des seconds rôles adultes ont des failles, des défauts. Certains ne s’en soucient pas tant que ça. Ils sont irresponsables, font des erreurs, mais ils n’en sont pas moins plein de bonté. Et puis il y a ceux qui veulent être plus sages que les autres, plus responsables que les autres, comme le personnage de Sachi. C’est pour eux, synonyme de sacrifice, mais aussi très naturel, même si cela peut leur jouer des tours et nuire à leur propre bonheur.
On pourrait reprocher au réalisateur ce trop plein de bonté et de bonne humeur. Tour à tour, les sœurs, vivent des choses qui pourraient les rendre dépressives voir folles. Mais ce n’est pas ce que Kore Eda veut montrer. Les personnages qui ont craqué ne sont pas dans le film. On ne voit pas la mère du Suzu, ni la femme dépressive du docteur que Sachi fréquente. A peine on aperçoit la mère des trois sœurs, au passé à-priori difficile, et encore, celle-ci est aujourd’hui épanouie. Ses souffrances semblent dater d’avant.
Entre quelques petites crises du quotidien, Kore eda choisit avant tout de filmer la bonté qu’il y a en tous ces personnages malgré leurs « défauts », qui sont surtout utilisés pour nous faire rire. Les moments de tendresse s’enchaînent parfaitement avec les moments droles et on se surprend à avoir un sourire aux lèvres depuis plusieurs minutes. Les quatre actrices sont fabuleuses et peuvent avoir leur chance pour un prix d’interprétation collectif. C’est probablement la seule recompense à laquelle semble d’ailleurs pouvoir prétendre le film.
En définitive, Kore Eda nous livre un beau film de cinéma, humaniste, mais certainement trop gentil pour faire l’unanimité.