Thèmes, métaphores et symboles dans The Neon Demon
Il est probable, lors de la séquence de masturbation, que Jesse ne se masturbe pas réellement. C’est peut être Ruby qui imagine la jeune fille en train de se caresser pour s’exciter. Si jamais, ce n’est pas un fantasme mais ce que Jesse fait réellement, cela renforce son amour pour elle-même qu’elle développe. Elle ne fait rien avec Dean ou Ruby car elle n’aime qu’elle, est égocentrique.
D’un point de vue relativement superficiel, on peut voir le cannibalisme, et les conséquences sur Gigi, comme une métaphore de troubles alimentaires qui touchent les modèles et nuisent à leur physique et mentale.
Si les hommes sont clairement mis au second plan pour presque disparaitre dans la deuxième partie du métrage, tout ne tourne pas autour de Jesse. Les trois femmes que sont Giga, Sarah et Ruby jouent un rôle très important : Sarah, c’est la beauté extérieure, beauté “qui se perd” avec l’âge et qu’elle tente de retrouver en suçant le sang de Jesse lorsqu’elle rate son défilé ; Gigi, c’est la fausse beauté, créée de toute pièce, par la chirurgie esthétique, le maquillage ; Et enfin, Ruby (Jena Malone), qui durant une bonne partie de l’oeuvre nous est présentée comme la beauté intérieure, la bienveillance, la gentillesse… même si elle prend une tournure beaucoup plus sombre sur la fin.
Le film a un coté profondément féministe : il parle de femmes, il les magnifie, les explore… alors que les personnages masculins ne sont que des faire valoir, comme les femmes le sont si souvent dans les films hollywoodiens.
La couleur joue aussi un rôle essentiel dans le film, avec une utilisation symbolique puissante pour les couleurs rouge et bleu notamment. Le rouge, qui peut représenter le danger, est d’ailleurs utilisé à chaque fois que Ruby est à l’écran. Le bleu, selon le réalisateur lui-même, fait référence au mythe grec de Narcisse et renvoie à l’attitude narcissique de Jesse. Toujours selon Refn, “Neon Demon parle de beauté, qui peut être décrite par les gens comme quelque chose de superficiel. Mais généralement les gens ont un rapport compliqué avec la beauté, parce que c’est vraiment à propos d’eux – notre vanité, comment nous nous voyons, narcissisme. Vous et moi ont été amenés à penser le narcissisme comme un tabou, quelque chose de négatif. Le génération de mes enfants, de Elle (Fanning), voient cela comme une vertu. C’est fascinant et complexe.”
Lorsque Jesse fait un cauchemar dans lequel Hank met son couteau dans la bouche de celle-ci, cela représente sa peur de la pénétration et le coté prédateur de la chose et des gens. La beauté, ce n’est pas qu’une apparence, mais aussi ce que les personnes voient en vous, la pureté et l’innocence qu’elle représente dans l’imaginaire collectif, mais aussi les désirs, la jalousie, la violence qu’elle engendre.
Les séquences clés du film
Au début du film, dans la séquence d’ouverture, Jesse apparait comme morte, le corps ensanglantée, étendue sur un canapé. On se demande si cela est réel et ce qui se cache derrière ces images, jusqu’à ce que le réalisateur nous montre que la jeune femme est bien vivante : Il s’agit simplement d’un shooting photo. Mais cette séquence n’est pas pour autant dénouée d’intérêt. Elle a une valeur prémonitoire sur le destin de Jesse.
La scène du défilé est un tournant majeur dans le film. Jesse prend conscience de sa beauté, de son pouvoir, et les couleurs virent progressivement du bleu au rouge, comme pour marquer une rupture, une transformation, mais aussi un destin tragique.
Plus tôt dans le film, dans la boite de nuit, Ruby demande à Jesse si elle préfère la nourriture ou le sexe, en parlant de rouge à lèvres. C’est, encore une fois, un indice prémonitoire sur les évènements de la fin du film. Lorsque Jesse repousse les avances de Ruby, elle ne représente plus le sexe pour celle-ci, et devient nourriture.
The Neon Demon : ça veut dire quoi ?
On peut faire plusieurs interprétations, tant le réalisateur s’amuse à brouiller les cartes et à présenter des personnages tantôt angéliques, tantôt démoniaques, comme la cité de Los Angeles, en apparence accueillante, merveilleuse et lumineuse, mais qui s’avère au final sombre, malsaine… On peut d’ailleurs imaginer que Los Angeles soit ce fameux Neon Demon, comme un lieu qui met la lumière sur un individu avant de mieux le détruire, le dévorer. Le Neon Demon peut être Ruby, et par extension les autres tops, qui se montrent au premier abord bienveillantes, avant de montrer une autre facette.
Enfin, et cela reste la théorie la plus plausible : The Neon Demon, c’est Jesse, la douce et innocente jeune femme qui attire la lumière sur elle et qui se révèle progressivement pus sombre que l’on pouvait l’imaginer, plus sournoise, comme pourrie à l’intérieur. Sa beauté n’est qu’extérieure, elle est maléfique.
Les références et influences
L’une des influences majeures du réalisateur est le cinéma horrifique italien, et on pense énormément à Suspiria dans l’approche et l’exploitation des couleurs et du rouge en particulier. La mise en avant du sang comme partie intégrante du corps fait aussi penser à Carrie de Brian De Palma. Réalisateur que l’on peut citer également pour l’approche paranoïaque du film : on a parfois du mal à savoir ce qui est réel et ce qui est dans l’esprit de la jeune femme, notamment pour tout ce qui se passe dans le motel. Cette ambiguïté sur le réel et le fantasme rappelle aussi l’oeuvre de Lynch, et en particulier Mulholland Drive, autre film se déroulant dans Los Angeles.
La paranoia ainsi que la rivalité entre les jeunes femmes, l’impact de l’âge, font aussi penser à Black Swan. Enfin, le nom d’un des rouge à lèvres, Redrum, est un clin d’oeil à Shining de Stanley Kubrick.
Même avec tous ces éléments, la fin du film reste quand même assez obscure, et il intéressant de s’y intéresser en détail.
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Merci pour cette analyse très intéressante.
J’ai trouvé intéressant aussi que Rudy maquille les cadavres- comme les tops-futurs cadavres, déjà mortes intérieurement…
Bonne nuit
Quoi que la première partie soit très intéressante, je suis beaucoup moins d’accord avec le deuxième soit tout le délire “satanique” qui à mon goût va beaucoup trop loin et pour plusieurs raisons. Le satanisme, (du moins actuel) n’autorise pas ce genre de pratique mettant en avant le meurtre ou le sang. Cependant le satanisme LaVayen encourage la confiance en soi et la considération de soi-même en tant que “propre-dieu”. Sinon le délire de sorcellerie ou je ne sais quoi tiens très peu debout pour moi. Cependant pour “l’enfer” l’on peut retrouver beaucoup de représentations de désir et punition, ou encore des péchés capitaux tel que la colère (meurtre) l’avarice et l’envie (jalousie), la gourmandise, la luxure et l’orgueil ect…..
En ce qui concerne sa beauté unique, elle ne l’est, justement, que par sa naïveté et son innocence, cette véritable beauté disparaît en même temps qu’elle devient pedante et superficielle….
Pour le reste, je n’ai pas vraiment aimé le film…..pas en tant que film d’horreur en tous cas !!! Il est comme toutes ces filles : pédant et artificiel, à mon avis.