Au revoir là-haut d’Albert Dupontel: analyse et explications

L’après-guerre: un purgatoire

Le refus d’Edouard ​​de voir sa famille révèle que la guerre n’est pas le seul mal qui peut affecter l’être. Ne s’étant jamais entendu avec son père, il vit dans une famille bourgeoise qui lui empêchait de concrétiser sa passion. De là, la guerre apparaît comme une libération qui permet au personnage d’enfin vivre sa vie. C’est en mourant (aux archives) qu’Edouard naît au monde en tant qu’artiste et en tant que lui-même. La difformité de son visage est alors seconde puisqu’elle révèle son identité première.

Edouard dans son lit d'hôpital avec une pancartes où il a écrit "merde".

Lorsqu’Albert efface Edouard des archives, la soeur de celui-ci demande à voir sa sépulture. Pradelle vient donc chercher Albert en lui disant de “trouver un mort pour la soeur”. Ce dernier trouve alors une tombe sans nom sur laquelle il appose la plaque d’Edouard. Néanmoins, la soeur demandant à voir le corps, ils sont alors contraints d’ouvrir la sépulture. Là, ils découvrent le visage d’un tirailleur sénégalais. Le petit rire de Pradelle témoigne du dédain qu’il a pour ce combattant. Cette scène est une critique de la France et de ses colonies dans lesquelles elle puisse sans scrupule pour trouver de la “chair à canon”.

On parle d’affaires, pas de vertu.

Lieutenant Pradelle (Laurent Lafitte)
Vu d'un cimetière vu d'en haut.

La guerre des pauvres

L’histoire d’Au revoir là-haut est racontée par Albert Maillard lors d’un interrogatoire. Arrêté alors qu’il était parti dans les colonies, Albert raconte toute son histoire. Il se remémore la souffrance d’Edouard mais explique aussi les délis qu’il a dû commettre pour son ami: falsifier les archives de guerre et les comptes de la banque de M. Périncourt, voler de la morphine. Si les deux premiers larcins sont dignes de Robin des Bois, le vol de la morphine le pousse à commettre des actes un peu moins respectables car il l’enlève à des nécessiteux. Cet acte montre la subjectivité des choix que l’on peut faire par amour.

La seule chose que la guerre m’a appris, c’est à taper sur plus faibles que moi.

Albert Maillard (Albert Dupontel)

De plus, ce film souligne un autre détail au sujet de l’après-guerre. Si les soldats étaient encore valides pour travailler après la guerre, ils ne retrouvaient des postes à leur niveau de compétences. Pour peu qu’ils aient été laissés par leur femme comme Maillard, ils se retrouvent seuls et sans avoir de quoi vivre. Albert est donc contraint de travailler pour deux en enchaînant les “petits boulots”. C’est sa rencontre avec M. Périncourt qui va lui permettre de s’élever vers de nouveaux domaines. Lorsque M. Périncourt lui demande “dans quelle branche il travaille?”, ce dernier répond “les plus basses!”. Ainsi, il est visible que ceux qui ont le plus souffert de la guerre sont en bas de l’échelle sociale. Ils continuent alors à lutter pour survivre pendant que les plus riches n’ont pas de sens de ces réalités.

Visage d'Albert éclairé par une lampe. Il est en sang.

Tous des pourris?

Albert Maillard vole des cartouches de morphine pour apaiser les douleurs d’Edouard car celles-ci sont trop cheres. Pour cela il doit s’en prendre à des gens invalides: handicapés, blessés de guerre… Maillard va jusqu’à les frapper pour récupérer le fabuleux produit. Un jour, toutes ses victimes le retrouvent et le passe à tabac. Pourtant, il continue, pour son ami, pour ne plus qu’il souffre. Il est l’emblème de l’ami qui a sacrifié sa vie pour l’autre. En opposition à des personnages comme Pradelle, il obtient la sympathie du spectateur car il ne fait pas les choses pour lui mais pour le bien des autres. Pour autant, il sera rattrapé par la justice lors de son exil aux colonies, comme on le voit dès le début du film.

Papiers de Albert pour le ministère de justice.

N’accordant pas le dernier mot à la barbarie et à l’injustice, Au revoir là-haut se termine sur une note positive avec la libération “secrète” d’Albert Maillard. L’homme ayant pris sa déposition choisit de le laisser partir en faisant croire à une fuite. Témoignant d’une justice partiale où seuls les riches s’en sortent, il montre que c’est par des sacrifices individuels qu’on parvient à rééquilibrer la roue de la justice. D’ailleurs, la mort de Pradelle est emblématique de ce principe.

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