Au revoir là-haut d’Albert Dupontel: analyse et explications

Devenir une oeuvre d’art

Si Edouard créait avant sa blessure, c’est elle, par la suite, qui lui permettra de se libérer du regard des autres. Condamné à rester dans un grenier puisqu’il est sensé être mort, il se consacre uniquement à son art. Il commence, tout d’abord, par se faire des masques pour cacher la partie manquante de son visage. Ces prothèses “améliorées” sont faites en papier mâché et elles lui permettent de changer de figure à loisir. Edouard rend au monde qui l’entoure sa poésie et sa légerté. Par l’art, il parvient à apaiser les maux et à rendre une humanité à celui qui pensait l’avoir perdu.

Edouard devant un chevalet avec plein de dessins autour de lui.

Mais les masques qu’il fait pour son usage personnel ne sont qu’un début dans sa création. En effet, il décide par la suite de participer à un concours pour la réalisation des monuments aux morts. Nouveauté du début du XXe siècle, les monuments aux morts ont été mis en place pour permettre à chaque famille de pouvoir se recueillir dans leur village respectif. Tant par vengeance que pour l’honneur de ses compagnons disparus, Edouard se lance dans ce concours. Avec l’aide d’Albert, il parvient à envoyer son dossier jusqu’à être sélectionné. De nouveaux horizons s’ouvrent alors à eux…

Edouard qui montre l'un de ses dessins pour les monuments aux morts.

Ô la belle vie!

Grâce à l’argent volé par Albert et à celui gagné lors du concours, Edouard et Louise partent s’installer à l’hôtel Lutecia. Lorsqu’Albert les y retrouve, il y découvre la grande vie des personnes fortunées. Ce passage du film n’est pas sans rappeler Gatsby le magnifique de Baz Luhrmann par l’atmosphère qui y règne. L’effervescence, la richesse, un lieu de fâte où l’hôte est inconnu, tout tient de la magnificence de l’histoire de Gatsby. Là où Edouard est Jay Gatsby, Albert est son Nick Caraway qui le suit et voit en lui la beauté de qui il est vraiment. Mais comme Gatsby veut attirer l’attention de Daisy, Edouard finira par attirer l’attention de son père pour d’ultimes retrouvailles.

À cette vie de tous les plaisirs s’ajoute aussi un désir de fuir, propre à Albert. Ce dernier veut s’enfuir dans les colonies et recommencer une nouvelle vie loin de tout ça. Cette pensée est représentative des hommes du début du XXe siècle en quête de richesses et d’un Eldorado. Mais l’impatience d’Albert ne laisse place qu’au regard indifférent d’Edouard car qu’importe le lieu il restera mutilé.

Gatsby le magnifique, film de Baz Luhrmann (2013).

Un “au revoir” mué… un rendez-vous manqué

Après une ultime accolade, Edouard s’élance et plonge dans le vide. Comme prédestiné par le masque d’oiseau, cette chute irrévocable dans le vide est un départ sans retour. Cet adieu au père et à la vie est une ultime preuve de sa liberté: il choisit sa mort faute de pouvoir décider comment vivre sa vie. La tristesse de la fin provient de l’espoir que nourrit le spectateur face à un amour paternel qui pourrait enfin se dire. ​Mais Edouard ne souhaite pas prendre de nouveau départ dans sa vie. Son visage, au moment où Albert parle de leur départ pour les colonies, retranscrit cette résignation. Les soirées, le pays ou ​l’amour ne changent rien à l’état d’Edouard: au fait qu’il ait besoin de morphine et de manger avec une paille. Il reste une “gueule cassée” et ne pourra plus jamais prétendre à une vie “comme avant”.

Image d'Edouard qui saute dans le vide (suicide).

Le dernier instant qu’il passe avec son père, sur le balcon de l’hôtel Lutecia, est intense en émotion pour le spectateur. Au moment où Edouard saute dans le vide, il sait qu’il a atteint tout ce dont il rêvait car il a enfin été enfin reconnu par son père. Ce dernier lui a même avoué tacitement qu’il l’aimait par une tendre accolade. Cette dernière scène montre que l’amour n’a pas besoin de mots pour être dit: un regard ou un geste suffit.

Au moment de sa mort, il avait les yeux clos et le cœur grand ouvert.

Sans plus attendre, Rob Reiner, 2007
Sans plus attendre, film de Rob Reiner (2007).

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