SANS UN BRUIT : Explications du film et de la fin

Une Bombe à Retardement… Silencieuse

L’une des particularités du film de Krasinski, qui en font un film d’horreur peu semblable aux autres, c’est la maîtrise invraisemblable du silence… ou plutôt du bruit, on ne sait plus vraiment, tant la tension est palpable à tous les niveaux sonores. Nous assistons, pendant 1h30 à une ode au Silence. Mais quel silence ! Lourd, perturbant, oppressant.

Pas un Bruit… C’est le titre du film mais c’est également le moteur du film. Alors que le film d’horreur classique joue sur les bribes de silence pour générer une tension palpable aux scènes de porteuses de suspens, Pas un Bruit récupère ce même ingrédient et l’inverse. Il ne s’agit pas, ici d’attendre le Silence, mais d’attendre d’entendre un bruit. Ce renversement des codes rend, par ce simple stratagème, le film absolument interactif. Le spectateur, pris par l’absence de bruits du film (du moins, ceux émis par les personnages), ne peut s’empêcher de retenir sa respiration autant que les protagonistes qu’il suit. Et ce détail, bien que semblant minime, représente tout l’intérêt du film.

Car, finalement, lorsque nous y réfléchissons, le film n’est pas le meilleur film d’horreur de tous les temps et n’est pas assez centré sur une psychologie des personnages pour en faire un ambitieux thriller. Par contre, ce qui le détache de certaines œuvres classiques du genre, c’est qu’il fait participer activement son spectateur. A partir du moment où le public fait moins de bruit dans la salle, que les personnages, nous pouvons finalement admettre que le pari est gagné pour Krasinski.

Tous les stratagèmes sont bons pour cette famille qui réussit finalement à vivre une vie de silence. Comment concevoir sa vie dans un silence complet, sans paroles et uniquement basée sur des jeux de regards et insinuations ? Une question intéressante qui nous pousse à réfléchir sur l’utilité complète de tous nos sens ? Cette problématique du film fait (vaguement) penser au film de David Mackenzie, Perfect Sense (2012), qui met en scène Eva Green et Ewan McGregor, qui dénués littéralement de tous leurs sens, doivent apprendre à vivre une histoire d’amour dans le chaos.

Dans Sans un Bruit, un éternuement, une parole, un pas, peuvent vous ôter la vie. Au moindre son, les créatures surgissent de nulle part et assassinent l’individu bruyant. Excitant… et à la fois très perturbant. Pourquoi, alors qu’il y a déjà si peu de survivants sur Terre, cette famille (entière qui plus est) a-t-elle réussi à survivre ? Une réponse simple à cette question  (et un des éléments clés du film): la fille aînée du couple, Regan (Millicent Simmonds) est née sourde. Grâce à cela et la maniabilité du langage des signes, la famille est déjà équipée pour pourvoir consommer une vie dans un silence de pierre.

  • Une scène d’Ouverture Haletante 

Le film nous annonce sa couleur dès son ouverture: nous sommes dans ce qui semble être un magasin désaffecté. Des papiers journaux froissés, des livres déchirés, des médicaments au sol, des étagères renversées,… Une définition adéquate de ce qui représente une scène chaotique. Pas l’ombre d’un bruit, ces’ à peine si le vent souffle par les portes fracassées du lieu.  Un lieu, au premier abord, désertique refroidit déjà le spectateur. Intervient rapidement l’onde d’une présence néanmoins. De présences, au pluriel puisque nous voyons plusieurs individus courir, gros plans sur leurs jambes, nous révélant, par la suite, que nous sommes invités à nous introduire dans les rangs d’une famille. Une femme et ses trois enfants font l’état des lieux, à la recherche de provisions quelconques et (nous le comprenons quelques plans après) de médicaments.

Une scène d’ouverture silencieuse, et pourtant, très mouvementée. Et par mouvementée, j’entends “riche en mouvements” et en acting. Beaucoup d’informations nous sont déjà divulguées, alors que les personnages n’ont pas encore dit un seul mot. Nous devinons par la pile de journaux survolant le sol que le monde (quelque soit le pays) est face à une menace conséquente: l’humanité est déchue de son héritage sensoriels les plus précieux: celui de la parole et de la possibilité d’invoquer le Son.

Cette scène d’introduction est dense et il s’y passe beaucoup de choses, qui seront, plus tard, la signature du film. Des pas légers surplombent la pièce, mais de manière plutôt fluide; des respirations étouffées, un fond d’asthme condensé.. Car il se trouve que l’un des enfants de la famille Abbott est en proie à une crise d’asthme qu’il n’a pas le droit d’exprimer. Cette violence en est d’autant plus appuyée qu’elle nous est dévoilée dans un stress prenant.

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4 commentaires
  1. Il ne dope pas le bébé c’est de l’oxygène parce qu’il l’enferme dans une boîte hermétique.

  2. Par contre pas très malin de prendre une hache et de vouloir attaquer alors qu’il avait juste à s’allonger et ne faire aucun bruit !

  3. Quelle passion! Quelle analyse! Ton texte est tellement chargé en émotions que je me suis instantanément senti replongé dans l’ambiance du film. Un chef d’oeuvre critique bravo! Je suis d’accord avec Seyto c’est de l’oxygène à mon avis aussi

  4. Merci beaucoup pour votre message et votre compliment, contente que cela vous ait plu. Bien noté pour l’oxygène. A bientôt !

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